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d’un peuple avec le dehors, quand on les prend sur une longue série d’années, se résolvent autrement qu’en une simple échange de produits contre produits, et en général, si les supputations de la douane étaient complètes, si les évaluations étaient exactes, on trouverait qu’après un certain laps de temps les chiffres se balancent. Au fond, les tableaux qui précédent ne paraissent pas s’éloigner beaucoup de ce résultat. Pour les quinze années qu’ils embrassent, la somme totale des importations s’élève à 13 milliards 271 millions, et celle des exportations à 13 milliards 36 millions seulement ; différence en faveur des importations, 235 millions. À cette somme totale des importations, il conviendrait d’ajouter les valeurs dérobées par la contrebande au contrôle de la douane, ce qui augmenterait sensiblement le chiffre, et rendrait la différence encore plus forte ; mais aussi nous avons vu que les évaluations de la douane sont inégalement faites, puisque les marchandises exportées sont estimées au départ, et les marchandises d’importation à l’arrivée, c’est-à-dire que, si les premières sont portées dans les états pour leur valeur réelle d’échange, les autres sont comparativement surfaites. Rien n’empêche donc de croire que, depuis 1830 jusqu’à 1844 inclusivement, l’équilibre s’est maintenu. Et, en effet, une seule chose aurait pu le rompre à notre avantage, en nous permettant de demander à l’étranger de plus grandes valeurs en marchandises que celles que nous lui aurions expédiées nous-mêmes : c’eût été l’extension nouvelle donnée à notre crédit par un large développement des banques. La propagation des titres de crédit rendant alors superflue une partie du numéraire dont notre circulation intérieure regorge, nous l’aurions versée au dehors, en échange contre des marchandises utiles, et la richesse du pays se serait accrue d’autant. De même, une seule chose aurait pu rendre l’importation sensiblement inférieure à l’exportation ; c’eût été l’appauvrissement du pays et le dépérissement intérieur de son crédit et de son commerce, circonstance qui, en amoindrissant d’une part ses ressources, en augmentant de l’autre le besoin du numéraire effectif dans ses transactions, l’aurait mis hors d’état de tirer de l’étranger l’exact équivalent de ses propres marchandises. Rien de semblable ne s’est rencontré en France. Au surplus, l’une ou l’autre de ces causes n’aurait encore rompu l’équilibre des importations et des exportations que d’une manière transitoire, et, le bénéfice une fois réalisé ou la perte consommée, cet équilibre se serait toujours rétabli sur de nouvelles Jases dans la suite des temps.