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que l’année 1830, qui ouvre cette série, affectée dans les derniers mois par la révolution politique qui signala cette époque, fut inférieure dans son ensemble à l’année 1829[1].

Acceptant toutefois comme juste cette comparaison entre la première et la dernière année de la série, nous trouvons que l’augmentation de l’une sur l’autre est de 1,129 millions, lesquels, répartis sur quatorze années, donnent une augmentation moyenne de 80 millions par an.

Ce mouvement ascendant de notre commerce extérieur est pourtant marqué, dans le cours des quinze années que nous parcourons, par quelques temps d’arrêt, et même par quelques pas rétrogrades ainsi, en 1831, 1834, 1837 et 1842 ; mais ces exceptions n’infirment point la règle, car il est facile de les expliquer, les unes après les autres, par des causes accidentelles, étrangères au mouvement commercial proprement dit. L’année 1831 se ressentit, comme on sait, de la commotion politique de 1830, dont elle porta, financièrement parlant, tout le poids. L’année 1834 vit naître et expirer la dernière grande émeute que l’émotion populaire, résultat de ce grand événement, ait enfantée. En 1837, le monde commercial fut ébranlé, depuis Washington jusqu’à Vienne, par la lutte du président Jackson contre la banque des États-Unis, et par la déroute générale des banques américaines. Enfin, c’est en 1842 que le changement du tarif des États-Unis ferma brusquement l’accès de ce pays à une masse considérable de nos marchandises. Au reste, à quelque cause que l’on attribue ces temps d’arrêt, ils sont encore aujourd’hui fort regrettables, car il ne nous paraît pas qu’ils aient été suffisamment compensés par des accroissemens extraordinaires dans les années suivantes ; mais on voit du moins qu’ils ne troublent pas d’une manière essentielle la loi générale du mouvement.

Il y a des conséquences d’un autre ordre, conséquences plus étranges ou plus inattendues, à tirer de ces tableaux.

Des trois périodes dans lesquelles nos quinze années se divisent, la dernière a été sans contredit la plus heureuse et la plus calme. Sauf le cri de guerre un instant poussé en 1840, et dont le monde financier n’a été que faiblement ému, aucun de ces accidens graves qui déterminent les crises commerciales n’a traversé le cours de ces cinq années prospères. On y voit figurer, du reste, l’année 1844, qui a été peut-être pour l’industrie la plus heureuse de notre histoire. Au contraire,

  1. année 1829 : commerce général, importations et exportations réunies, 1,224 millions.