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moins involontaires ? Si l’induction est fausse, on conviendra qu’elle est assez naturelle.

Je comprends, au reste, que le parti napiste, en partage du pouvoir, et qui aspire à le prendre tout entier, trouve de tels souvenirs et de tels raisonnemens aussi malséans qu’incommodes, je comprends également qu’à Athènes le parti national, qui vient de contracter avec les napistes un mariage forcé, comme le parti anglais qui les convoite, jettent d’un commun accord un voile complaisant sur le passé ; mais il faut qu’à Athènes comme à Paris et à Londres les partis s’habituent a entendre avec un peu de patience raconter leurs variations et leurs inconséquences. Il faut surtout qu’ils renoncent à la singulière prétention d’imposer à leurs amis du dehors les finesses et les dissimulations dont s’alimente leur tactique du moment. Ajoutez que cette tactique est sujette à de rapides évolutions, et que les alliés d’un mois ne sont pas toujours ceux de l’autre. Tout peut donc être changé dans l’intervalle de deux paquebots, de sorte qu’en définitive on risque toujours de contrarier et de desservir ceux-là même que l’on voudrait servir et contenter. Mieux vaut cent fois dire les choses telles qu’elles sont et conseiller que flatter. La presse française au dehors a ce beau privilège, qu’on attend ses jugemens avec inquiétude, et qu’on les subit avec douleur. Elle se manquerait à elle-même si, pour distribuer l’éloge ou le blâme, elle ne s’élevait pas au-dessus de l’intrigue du jour. Un journal dont je ne partage pas les opinions, le Journal des Débats, vient de s’honorer en signalant à l’indignation publique les actes exécrables que commet en Espagne le parti prétendu modéré, et c’est, dit-on, à son blâme énergique que trois nouvelles victimes ont dû tout récemment leur salut. C’est un exemple qui prouve quel bien la presse française peut faire quand elle ne se laisse pas dominer par de mesquines considérations.

Tout bien considéré, et sans me préoccuper des questions purement personnelles, je me vois donc forcé de persister dans l’opinion que j’ai exprimée, dans le jugement que j’ai porté. J’ajoute que cette opinion et ce jugement n’ont rien de neuf, et que dans tous les livres que j’ai pu consulter, dans tous les renseignemens qu’à Paris même j’ai dû prendre, je les retrouve pleinement confirmés et justifiés. Je reconnais d’ailleurs que dans un pays où les partis se sont si souvent mêlés, confondus, transformés, il est difficile de distinguer certaines nuances, et plus difficile de les reproduire. Je reconnais aussi qu’au milieu de versions diverses, et souvent contradictoires, quelques erreurs de détail ont dû m’échapper. Ainsi, dans une note pleine de dignité et de