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Il lui fallut presqu’aussitôt se résoudre à cette dernière extrémité ; il lui fallut rompre toutes relations diplomatiques et se retirer sans avoir même abordé officiellement aucune discussion qui touchât aux intrigues russes, rompre et se retirer pour ce tort insignifiant du gouvernement du shah vis-à-vis de son messager, et non point pour cette hostilité continue qui depuis trois ans menaçait les barrières de l’Inde anglaise. La majesté du nom britannique était perdue au grand profit de ces bons alliés qui avaient inventé tout exprès l’entente cordiale de l’Angleterre et de la Russie en Orient.


Meshed, 25 juin 1838.

M. M’NEILL A LORD PALMERSTON

« Après avoir épuisé tous les moyens que je pouvais imaginer pour amener le gouvernement persan à m’accorder la satisfaction qu’il me doit au sujet du messager, voyant bien que je n’obtiendrais rien, je me suis enfin senti obligé de quitter la cour.

« Il est maintenant de toute nécessité qu’une réparation publique vienne prouver aux peuples de la Perse et de l’Asie centrale qu’on ne nous insulte pas impunément. Nous ne saurions autrement, je ne dis pas reprendre notre première position, mais garder encore un peu de considération et de crédit. Les Persans et les Afghans réunis au camp du shah ont vu avec une sorte de stupéfaction qu’on pût traiter une ambassade anglaise comme une troupe de proscrits, punir ceux qui par hasard l’approchaient, et permettre à des officiers russes de menacer quiconque était surpris me rendant visite sous ma tente. »



C’est après en être venu à ces extrémités, c’est après qu’il ne reste plus aucun espoir de l’emporter par une sage et ferme assurance que M. M’Neill reçoit la réponse écrite à sa lettre du 8 mars, en date du 21 mai. Cette fois, on lui permettait d’agir au nom de l’Angleterre, et de déclarer nettement la façon dont elle considérait les procédés du shah :

« Il fallait lui dire tout de suite, mandait lord Palmerston, que le gouvernement britannique voyait dans cette expédition un esprit d’hostilité tout-à-fait incompatible avec l’esprit et l’intention de l’alliance établie entre la Perse et la Grande-Bretagne. »

Au même moment, une flotte anglaise, envoyée par le gouvernement de l’Inde, débarquait sur la côte de Perse, et prenait possession de l’île de Karrack. M. M’Neill renvoie alors un émissaire au camp du shah, pour y annoncer et la résolution de lord Palmerston et l’arrivée