Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 9.djvu/732

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des commerçans. En appliquant cette règle au recensement de 1831, on est arrivé aux résultats suivants :

Personnes de tout âge et de tout sexe trouvant, soit directement, soit indirectement, leurs moyens d’existence dans l’exercice des :
1° professions libérales : 125,788 ou 16 pour 100.
2° profession commerciales : 70,727 ou 9 pour 100.
3° professions mécaniques : 337,921, 43 pour cent
4° profession salariées : 172,890, 22 pour cent.
5° professions militaires : 78,586, 10 pour cent.
TOTAL : 785,862, 100 pour 100.

On s’étonnerait avec raison qu’un sixième de la population parisienne appartînt aux professions libérales, si nous n’ajoutions pas qu’on a compris dans cet ordre tous ceux qui vivent tant bien que mal d’un revenu capitalisé, d’un emploi, d’un talent. Ainsi, la moitié de ce premier groupe est formée par les propriétaires, et les rentiers, au nombre de 61,000 ; mais, combien de propriétaires nécessiteux, combien de rentiers dont l’existence n’est qu’un prodige d’économie ! 27,000 employés ou commis végètent, à peu d’exceptions près, dans des conditions subalternes. Quant aux personnes engagées dans les carrières où la culture de l’esprit est une nécessité, si peu nombreuses qu’elles puissent être, elles le sont beaucoup trop sans doute pour les ressources que leur offre notre société. Les fonctions qui ont pour base la science des lois, la magistrature, la procédure, le notariat, procurent à 7,000 personnes environ une existence plus souvent honorable que lucrative ; combien d’avocats sans causes sur les 977 inscrits à la cour royale, sans compter 760 stagiaires ! Il est triste pour les médecins, mais heureux pour la société que le nombre des malades n’augmente pas en proportion de celui des docteurs : au lieu de 1090 reçus en 1833, on en possède aujourd’hui 1430. Evaluer à 10,000 ames la famille des architectes, sculpteurs, peintres, dessinateurs et graveurs, ce serait assurément rester au-dessus de la réalité. Quant aux artistes musiciens et aux hommes de lettres, les documens officiels ne nous fournissent pas les moyens d’en opérer le dénombrement avec le degré d’exactitude désirable. Bien que tout le monde ait aujourd’hui la prétention d’écrire, et que la musicomanie soit un des travers de notre époque, nous croyons qu’en général le nombre de ceux qui cultivent les arts ou la littérature, avec l’intention d’en faire exclusivement leur métier, tend à décroître depuis quelques années : d’amers désenchantemens ont fait évanouir bien des vocations douteuses.