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contre les troupes rebelles. À ce moment décisif, il ne dépendait peut-être que de M. de Palmella d’arrêter la révolte et de la comprimer ; il suffisait pour cela de maintenir la reine dans ses bonnes dispositions, et de couper court aux tergiversations du maréchal duc de Terceira, qui commandait les troupes en garnison dans la capitale. Les premières heures de son ministère, M. de Palmella les perdit dans une complète inaction. Durant ces heures si précieuses, le roi dom Fernando ressaisissait son empire sur l’esprit de la reine ; ses émissaires gagnaient publiquement les troupes à la cause des rebelles, et M. le duc de Terceira, voyant enfin clairement à qui appartenait, la victoire, faisait aussi proclamer la charte par la garnison du château. Au ministère Palmella succéda immédiatement le ministère Terceira ; le premier avait duré quarante-huit heures environ.

M. da Costa-Cabral ; cependant, n’était pas encore maître de la situation ; M. de Bomfim tenait toujours, dans les provinces, pour la constitution de septembre ; il fallut, pour le décider à déposer les armes, revenir un peu sur ses pas et promulguer un décret qui, à la vérité, abolissait la constitution de septembre, mais annonçait que des cortès nouvelles seraient convoquées pour réviser la charte. La formation du nouveau cabinet était d’ailleurs la plus significative des concessions qu’en de telles circonstances l’on pût faire aux septembristes : M. le duc de Terceira avait pris pour collègues deux hommes éclairés et concilians, M. Jorge Loureiro, président du conseil en 1535, et M. Mousinho d’Albuquerque, qui tous deux avaient puissamment contribué à la fortune politique du duc et à sa réputation militaire, quand ils étaient, le premier son chef d’état-major dans les Algarves, le second son aide-de-camp. Plus que jamais il paraissait démontré que, pour quelque temps du moins, M. da Costa-Cabral demeurerait en dehors du pouvoir. M. de Bomfim se laissa prendre à ces beaux semblans de conciliation, il s’empressa de reconnaître le nouveau régime ; mais les illusions ne furent pas de longue durée. Renvoyant brusquement ses amis les plus éprouvés, MM. Jorge Loureiro et Mousinho d’Albuquerque, M. de Terceira ouvrit à deux battans les portes du cabinet à M. da Costa-Cabral, et de fait, tout en conservant la présidence, lui abandonna la première place. En vain quelques bataillons menacèrent-ils çà et là de reprendre les armes ; en vain un grand nombre de municipalités adressèrent-elles à la reine des représentations énergiques : la réaction marchait irrésistible, et décidée à ne plus garder le moindre ménagement. Des décrets, promulgués coup sur coup, comblèrent d’honneurs et de titres les chefs de la dernière révolte, réintégrèrent dans les cadres de l’armée et avec des grades supérieurs les officiers chartistes vaincus dans les insurrections précédentes, et, aux termes de la charte, convoquèrent les cortès ordinaires, avec aussi peu de façons que si la constitution de septembre n’avait jamais existé.

À cette époque s’est formée la coalition entre les septembristes et cette fraction des chartistes à laquelle appartiennent M. Mousinho d’Albuquerque et M. Jorge Loureiro. A la chambre des députés, où, par le système électoral