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obscurs de la chambre élective ; son histoire ne commence qu’au mouvement révolutionnaire de cette époque, dont il fut un des acteurs les plus énergiques et les plus déterminés. En ce moment-là, ce n’était point assez pour lui que la constitution nouvelle : en pleines cortès, il demandait hautement qu’on revînt sans détour à la loi de 1820. Les chartistes, dont il est aujourd’hui le chef et le principal appui, n’avaient point alors de plus violent ni de plus opiniâtre adversaire ; en 1837, quand M. de Bomfim eut comprimé la révolte des maréchaux, M. da Costa-Cabral, qui durant toute la campagne lui avait été adjoint par les cortès en qualité de commissaire, fut le plus prompt et le plus ardent à solliciter contre les vaincus les mesures rigoureuses ; plus tard, à l’époque où les cortès constituantes donnèrent enfin une sanction définitive à la fameuse loi de septembre, M. da Costa-Cabral se prononça formellement en faveur d’une seule chambre composée des élémens les plus démocratiques, repoussant toute espèce de chambre haute, sénat héréditaire, sénat procédant de la nomination royale ou jusqu’à certain degré de l’élection populaire. Le jeune député refusait aussi le droit de sanction à la couronne ; applaudi dans les clubs, tout puissant déjà dans les loges maçonniques qu’en Portugal on est sûr de retrouver au fond de toutes les agitations civiles, M. da Costa-Cabral ne fut point étranger aux émeutes de l’Arsenal du 9 et du 13 mars 1838. Pour M. da Costa-Cabral, du reste, l’effervescence ne fut pas de longue durée ; lors de ces émeutes déjà, sa conversion aux idées gouvernementales n’était plus un secret au palais ni dans les chambres ; quand le ministère de M. de Sà da Bandeira, qui pendant quelque temps pacifia la ville et le royaume, investit M. da Costa-Cabral des importantes fonctions de gouverneur civil de Lisbonne, personne, même parmi ses anciens amis, ne songea le moins du monde à se récrier. Ici commence pour M. da Costa-Cabral une phase complètement nouvelle : dès ce moment, dévoué aux idées conservatrices autant pour le moins qu’il l’avait été à la révolution, il dépense à les défendre plus d’énergie encore qu’il n’en avait mis jusqu’alors à les combattre. L’avenir, et par cet avenir nous entendons l’issue prochaine de la crise politique et financière où il se débat aujourd’hui, l’avenir nous dira quel a été son mobile, l’ambition personnelle, ou le bien d’un pays déchiré jusque dans les entrailles. A la vérité, quelques mois après, l’administration septembriste du 26 novembre étant venue à se former, M. da Costa-Cabral y fut appelé par M. de Bomfim, qui lui confia le portefeuille de la justice ; aux reproches que les deux partis auraient pu lui adresser, il essaya de se soustraire en gardant un silence à peu près absolu. Exclusivement renfermé dans son département, M. da Costa-Cabral ne semblait viser qu’à une réputation de ministre spécial et pratique ; on ne prévoyait point que trois ans plus tard la politique du royaume recevrait de lui l’impulsion générale, et qu’il en assumerait hardiment toute la responsabilité.

La fin de ce cabinet du 26 novembre fut éprouvée par de rudes émeutes que M. de Bomfim comprima, assisté du ministre Rodrigo da Fonseca Magalhães. De son côté, M. da Costa-Cabral ne fit point preuve alors, loin de là,