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représentant à Florence. C’est le prince de Metternich qui s’est chargé de lui répondre par une lettre ironique et hautaine, où le vieux diplomate demande ce que deviendra l’ordre en Europe si les princes se mettent à favoriser des révoltés et à les soustraire à la justice de leur gouvernement. Le cabinet de Vienne a fait encore sentir son mécontentement en donnant l’ordre à son ministre à Rome de ne plus continuer à représenter le grand-duc, comme cela s’était toujours fait jusqu’à présent, En dépit de ces démonstrations, Léopold II semble vouloir garder une attitude digne et calme. La mort de M. Corsini, ministre des affaires étrangères à Florence, avait fait un vide dans le cabinet. Le grand-duc vient de compléter son ministère de manière à faire comprendre qu’il entendait maintenir son indépendance. Dans ces dernières affaires, notre diplomatie, représentée par M. de La Rochefoucauld, a su seconder avec une habile prudence les intentions du souverain de la Toscane.

Nous parlions dernièrement des envahissemens toujours croissans du radicalisme en Suisse ; en voici un nouvel exemple. Le gouvernement du canton de Vaud avait enjoint aux pasteurs de lire en chaire une proclamation politique. Les pasteurs ne voulurent pas se prêter à cette invasion de la politique dans le temple, et ils refusèrent la lecture. Le conseil d’état, c’est-à-dire le pouvoir exécutif du canton de Vaud, prononça contre les pasteurs certaines peines disciplinaires. Les pasteurs pensèrent alors qu’ils n’étaient plus libres et qu’ils manquaient désormais de l’indépendance nécessaire à leur ministère ; ils convoquèrent une assemblée, et, après une délibération solennelle, une démission collective fut adressée par cent cinquante-trois d’entre eux au conseil d’état. Le pouvoir exécutif espéra d’abord que les démissions seraient retirées quelques jours après : elles furent maintenues. Le grand conseil du canton investit le conseil d’état des pouvoirs nécessaires pour subvenir aux besoins spirituels de sa population ; mais où trouver des pasteurs ? Comment improviser des ministres ? Faudra-t-il que la population attende que les jeunes candidats qui n’ont pas encore achevé leurs études soient devenus capables d’exercer les fonctions du ministère évangélique ? On a peine à comprendre la singulière légèreté d’un pouvoir qui s’attaque étourdiment aux droits les plus sacrés de la conscience et de la liberté religieuse. Les pasteurs ont refusé d’entrer dans l’arène des passions politiques : on a voulu les en punir, et ils se séparent, avec fermeté et au prix de tous les sacrifices, d’un gouvernement qui a blessé leur foi et leur liberté.

La convocation que vient de faire M. Cunin-Gridaine des conseils-généraux de l’agriculture, du commerce et des manufactures, est une mesure dont on peut se promettre quelques bons résultats. Ces conseils avaient été réunis à la fin de l’année 1841 : depuis quatre ans, des questions nouvelles ont surgi, ou sont arrivées à cette maturité qui appelle une décision législative. Tout en indiquant les principaux problèmes que les conseils auront à