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systèmes ; figurez-vous-les surtout en présence de ce parti du droit divin que je signalais tout à l’heure. De part et d’autre, ces excès incroyables se valent, et ces hommes, séparés par des abîmes, finissent par se rencontrer sur un point. M. Stahl ne veut pas d’une constitution ; eux aussi, ils la repoussent. Que serait une constitution, je vous prie, pour ce radicalisme absolu, bien décidé à changer la face des sociétés humaines ?

Je viens d’indiquer les deux partis extrêmes ; c’est dans un milieu plus calme et plus intelligent que se place le mouvement sérieux des bons esprits, la vraie discussion des idées. Il y a plus de trois ans, dans les premiers mois de 1842, un publiciste peu connu jusque-là, M. Bülow-Cummerow, fit paraître sur la Prusse et sur toutes les questions du jour un travail important qui fut très remarqué. La Prusse, sa constitution, son administration et ses rapports avec l’Allemagne, tel était le titre de ce livre. M. Bülow-Cummerow s’est placé, par ce manifeste, à la tête de ce qu’on a appelé le centre droit. C’est un Prussien dévoué : il a une foi vive dans les destinées de son pays, il souhaite une constitution pour la Prusse, et pour l’Allemagne une forte unité politique ; mais, quand il expose son système, quand il discute les théories diverses qui se présentent, sa pensée est incertaine, il hésite, et se contredit trop souvent. Après avoir fait preuve des intentions les plus libérales, il finit par redouter l’influence des assemblées, il craint que le principe monarchique ne soit entamé et bientôt envahi, si la constitution accorde aux chambres une part effective du pouvoir. M. Bülow-Cummerow ne partage pas les opinions de M. Stahl, et les combat même avec vivacité ; cependant il arrive presque au même résultat que le professeur de Berlin : les chambres ne doivent être, selon lui, que des assemblées consultatives. Hâtons-nous d’ajouter que M. Bülow-Cummerow étend beaucoup les attributions de ces chambres, et qu’en cela du moins il est bien plus libéral que M. Stahl. Les chambres, il est vrai, ne pourront que donner leur avis, mais cet avis devra leur être demandé, et non pas seulement dans les questions de finances, dans les affaires du budget, mais pour tous les grands problèmes qui intéressent le pays. M. Bülow-Cummerow s’est recommandé surtout, dans ces derniers temps, par l’intelligente sollicitude avec laquelle il a suivi les délibérations des états provinciaux. Il a publié l’année dernière, sous le titre de Dissertations politiques et financières, des résumés fort instructifs, où sont nettement exposés les travaux des états dans les différentes provinces du royaume. Pour tout ce qui concerne l’administration et les finances,