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et plusieurs allèrent grossir les rangs des Flamands insurgés. Cette première coalition n’aboutit pas, il est vrai, à une fusion de principes : chacune des parties contractantes réserva les siens ; et, quand l’insurrection eut succombé, moins par les armes autrichiennes et l’impéritie de Vandernoot, son chef, que par l’indifférence de la majorité des Wallons pour un mouvement dont l’ultramontanisme était en définitive le principal moteur, une autre lutte recommença entre les prêtres et les philosophes. L’invasion républicaine trouva, au sein des provinces gallo-belges un parti prêt à la seconder dans sa croisade contre l’esprit clérical. La persécution terroriste recruta ses plus fougueux auxiliaires dans les libéraux insurgés de 1788, dans ceux-là même qui avaient le plus efficacement secondé le parti prêtre contre l’empereur Joseph II. Plus tard, le concordat napoléonien fut salué en même temps par les murmures du clergé flamand et par les applaudissemens du libéralisme wallon.

Comprimé vingt ans par la domination française, l’ultamontanisme belge se redressa plus impérieux que jamais, après 1815, devant la suprématie protestante des Orange-Nassau. Le clergé belge avait partagé d’abord cette illusion, commune à beaucoup de partis et même de gouvernemens, que 1815 était la négation radicale, absolue, des principes consacrés par la révolution française, tant dans le domaine civil que dans le domaine religieux. Aussi ne vit-il pas sans surprise et sans murmures la constitution du nouveau royaume des Pays-Bas accueillir certaines maximes de liberté. Il n’était pas à bout de déceptions. Guillaume maintint le concordat napoléonien dans ses garanties, et le restreignit dans ses concessions à la cour de Rome. La nomination des évêques fut déférée aux chapitres, sauf l’approbation des candidatures par le roi, et un arrêté dénia au pape le droit d’intervenir dans les affaires des diocèses belges. Le clergé, qui n’avait vu dans l’avènement d’un prince hérétique, par conséquent suspect à une bonne moitié de la nation, qu’un moyen de prépondérance, se trouvait ainsi placé sous la surveillance immédiate de celui qu’il espérait effrayer et dominer. Il cria à la persécution. Guillaume ne s’en émut pas et poursuivit paisiblement son œuvre. Le pape avait fulminé des bulles menaçantes : la circulation de ces bulles fut interdite. Les couvens, centres naturels des prédications ultramontaines, prenaient une extension dangereuse : le personnel des couvens fut limité, et ceux qui relevaient d’un chef étranger furent abolis ; les frères ignorantins, qui travaillaient sourdement le peuple, virent plus tard leurs écoles supprimées en vertu de cette dernière disposition. Le