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à la pairie ; or, je suis persuadé, quant à moi, que les deux révisions doivent se faire ensemble. La réforme de la pairie est plus urgente encore que la réforme de l’élection parlementaire, car depuis quinze ans le pouvoir de la chambre des députés ne s’est pas affaibli, et son autorité peut se passer d’une impulsion nouvelle. En est-il de même de la pairie ? Que tout homme de bon sens et de bonne foi s’interroge à ce sujet.

Lorsqu’on fit en 1830 la loi électorale qui nous régit, la chambre des pairs n’était pas encore constituée, et la chambre des députés s’inquiétait de savoir comment s’établirait l’équilibre entre ces deux assemblées politiques, dont l’une, la chambre des députés, discutait à cette heure sa propre organisation en discutant la loi électorale, et dont l’autre, la chambre des pairs, était encore en suspens. « Nous manquons, disait la commission chargée d’examiner la loi d’élection, nous manquons de base réelle ; nous ne savons si le pouvoir que nous allons créer s’équilibrera avec les deux autres… Et, par exemple, dans la cas où la chambre des députés serait composée d’élémens très populaires, comment pourrait-on espérer de lui donner un contre-poids suffisant, si on ne contractait pas d’avance l’engagement de constituer plus fortement la pairie ? » Ces paroles sont curieuses ; elles montrent combien à cette époque tout le monde était préoccupé de l’idée de fonder une pairie qui fût forte et capable de remplir les hautes fonctions qui lui sont attribuées ; elles montrent aussi combien cette idée d’un juste équilibre entre les deux chambres était accréditée alors, et comment, au moment même où la chambre des députés discutait sa propre organisation, elle s’inquiétait aussitôt de l’organisation de la pairie, ne pensant pas qu’une réforme pût se faire sans l’autre.

Ainsi, ne pas réviser la loi électorale sans réviser en même temps la loi qui règle l’admissibilité à la pairie, ne pas toucher à une chambre sans toucher à l’autre, ne pas ajouter à la force de l’assemblée qui est déjà forte, sans fortifier aussitôt l’assemblée qui est faible, voilà ma première conclusion.

Il est un autre motif qui me fait penser qu’il est à propos de s’occuper de l’état de la pairie, ce sont les nominations de pairs faites cette année par le ministère.

Les nominations de cette année ont eu un caractère tout particulier qu’il faut indiquer : elles n’ont pas été faites dans un but politique ; elles ont été faites pour remplir des promesses particulières et pour