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mais déjà l’agitation se calme, la réflexion renaît, et les adversaires de Maynooth paraissent eux-mêmes un peu surpris, un peu confus de leur si vive émotion. Si d’ailleurs les jambes, les bras, la voix surtout, ne lui manquent pas, le parti fanatique n’a de tête ni dans l’une ni dans l’autre des deux chambres. Voilà long-temps qu’il ne compte plus sur les whigs. Quant aux tories, tous leurs hommes distingués font partie du cabinet actuel, l’exception de M. Gladstone, qui ne tardera pas à y rentrer, et qui s’est prononcé plus nettement que personne. Grace à l’éternelle jeunesse du duc de Wellington, lord Stanley s’est peu montré cette année ; toutefois il en a dit assez pour enlever au parti fanatique toute espèce de confiance. Il n’est pas jusqu’aux trois membres de la jeune Angleterre, dont deux, lord John Manners et M. Smythe, ne se soient rangés, dans l’affaire de Maynooth au moins, du côté de la raison et de la tolérance. Le duc de Buckingham, le duc de Richmond, lord Ashley, sir Robert Inglis, lord Winchelsea, M. Colquhoun, le colonel Sibthorp, le duc de Newcastle, et quelques orangistes, voilà les chefs véritables, les seuls chefs des tories dissidens. Or, personne en Angleterre ne voit et ne peut voir en eux les élémens d’une administration. Ce n’est pas tout : les adversaires de Maynooth se divisaient en deux fraction distinctes, ou, pour mieux dire, contraires, ceux qui combattaient le bill au nom du vieux principe exclusif et de l’union indissoluble de l’église et de l’état, ceux qui le combattaient au nom du principe volontaire et de la séparation absolue de l’état et de l’église. Ceux-ci, dissidens pour la plupart s’indignaient, comme les premiers, que l’on votât des fonds pour l’église catholique en Irlande ; mais ils s’indignaient aussi qu’on y maintînt l’établissement anglican, et ils en demandaient ardemment la destruction. Croit-on qu’une fois le bill de Maynooth passé, il fût facile de faire marcher d’accord ces alliés d’un moment ? De plus, parmi les partisans du principe volontaire en matière religieuse, beaucoup réclament aussi l’extension du suffrage en matière politique et la liberté absolue des échanges en matière de commerce. Croit-on qu’il fût aisé de les amener à se ranger sous le drapeau du duc de Buckingham et du colonel Sibthorp ? Dans la résistance que le bill de Maynooth a rencontrée, il y a un pêle-mêle qui, dans le bill d’éducation avait disparu. Ce pêle-mêle se retrouvera difficilement, s’il se retrouve, et, dans tous les cas, il ne surprendra plus personne.

Il convient, en outre, de se demander comment désormais la question se posera. Il y a, quant à l’église d’Irlande, quatre opinions en présence : celle des ultra-tories, qui voudraient maintenir l’état actuel ;