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d’Exeter, par une lettre-circulaire, déclara que, « tout en conservant son avis sur la rubrique, il abandonnait, quant à présent, le surplis, et qu’il conseillait à son clergé de ne faire aucune innovation dans le service, sans s’assurer d’avance de l’assentiment du peuple. » L’évêque de Londres, avec moins d’éclat, donna les mêmes avis, et de ce grand mouvement, de ce grand bruit, il ne resta bientôt, à la surface du moins, qu’une légère agitation et quelques murmures lointains.

Cependant ce n’est point seulement le surplis qui succombait devant la robe noire, c’est aussi l’autorité épiscopale devant l’autorité des congrégations. Les évêques de Londres et d’Exeter avaient voulu imposer, non pas une liturgie nouvelle ; mais l’exécution stricte et rigoureuse de l’ancienne liturgie anglicane. Les congrégations avaient résisté au nom du principe protestant, de ce principe en vertu duquel la souveraineté religieuse appartient au peuple, non aux ministres de l’église, et les congrégations l’emportaient sur tous les points. C’est là un fait grave, d’autant plus grave qu’il est en opposition avec la vieille doctrine de l’église fondée par Henri VIII, par Édouard VI et par Élisabeth. D’après cette doctrine, l’église anglicane n’est pas infaillible comme l’église romaine et les livres saints, tels que les énumèrent les trente-neuf articles, sont la seule règle de foi, mais les livres saints interprétés par les évêques et par les ministres régulièrement ordonnés. Or, voici qu’au sein même de l’église anglicane une idée fort différente, l’idée puritaine, a prévalu ; voici qu’il est entendu qu’en tout ce qui concerne la rubrique et la liturgie, il faut, avant tout, consulter le vœu des populations. Les presbytériens de 1661 ne demandaient pas tant, quand Charles II refusa de les écouter et qu’ils furent contraints de donner leur démission.

La paix semblait ainsi rentrée dans l’église ; cependant, parmi les vainqueurs eux-mêmes, il existait certaines divisions qui, peu de temps après, faillirent rallumer la guerre. Voici à quelle occasion.

J’ai dit qu’en 1562 les trente-neuf articles avaient été rédigés à dessein d’une manière assez élastique, assez large, pour qu’ils pussent admettre des opinions et des tendances fort diverses. De là, au sein même de l’anglicanisme, une opinion moyenne qui, craignant d’être entraînée d’un côté ou de l’autre, s’efforce sans cesse de réprimer les envahissemens catholiques et les usurpations protestantes. C’est cette opinion qui, en 1836, s’était unie aux anglo-catholiques pour faire expulser de l’université le docteur Hambden, suspect de rationalisme ; c’est cette opinion qui, en 1843 et 1844, s’était associée aux protestans extrêmes, d’abord pour obtenir la suspension du docteur Pusey,