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point dans ses vieux jours, et lui assure une existence modeste, mais à l’abri de toute chance, jusqu’à ses derniers instans.

Ce qui se passe sous nos yeux n’est pas entièrement, nous l’avons dit, d’accord avec ce tableau. Le privilège et la faveur, ne sont pas encore dépossédés. Il se commet des indiscrétions, les ordres n’obtiennent pas toujours une fidèle et entière exécution, le devoir n’a pas beaucoup d’adorateurs fervens. Les salaires, insuffisans en grand nombre, ne sont pas répartis dans des proportions équitables, ni soumis.assez souvent à la loi progressive par laquelle ils deviendraient un moyen de discipline, une récompense des bons services. Enfin les retraites ne sont point placées sous une loi normale dans les services civils. Chaque classe de fonctionnaires, considérée isolément, jouit d’avantages ou souffre d’inconvéniens qui lui sont propres. L’armée seule a obtenu un système complet de garanties. Depuis l’arrivée sous le drapeau jusqu’à la mort, le militaire est protégé, soutenu, récompensé. Son emploi lui est assuré autant que le comportent les nécessités publiques. Des salaires réglés avec libéralité, du moins dans les rangs supérieurs, et des retraites suffisantes pourvoient à tous les besoins On prépare les aspirans par de longues études, on promet l’avancement aux plus capables. La magistrature, l’université, le corps des ponts-et-chaussées et des mines, jouissent aussi de garanties réelles ; mais les rémunérations ne sont pas en rapport avec ce que la société doit à ceux qui lui consacrent tant d’habiles et courageux efforts. Dans le personnel diplomatique et consulaire, dans la haute administration, les emplois sont moins stables, mais la mobilité des affaires l’exige ; les traitemens, calculés d’après des nécessités spéciales, sont élevés sans être excessifs. C’est dans les dispositions susceptibles de garantir le choix des hommes les plus capables, c’est dans les moyens de les instruire et de les former, que la règle fait défaut. Le personnel des administrations centrales souffre, aussi de l’absence de ces moyens d’instruction ; il est trop nombreux, trop peu rétribué dans les rangs inférieurs, soumis à des règlemens dont la diversité n’est point justifiée. Enfin les régies financières ne paraissent réclamer que la consécration officielle et durable des mesures déjà introduites par des chefs expérimentés, une éducation théorique au début, et plus d’uniformité dans des services si analogues. Ces lacunes sont dignes d’exciter l’intérêt du gouvernement et des chambres, et notre travail, si imparfait, ne sera pas sans utilité, s’il a pu contribuer à les signaler et inspirer le désir de les faire disparaître.


VIVIEN.