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institué pour les ecclésiastiques entre eux. Voilà la confession introduite dans l’église protestante ; rien de mieux. Ce qui suit est plus grave ; on demande en outre que les ecclésiastiques soient soumis à une inspection réciproque : cette fois, c’est bel et bien l’espionnage ; nous voici loin du jansénisme, le plagiat de saint Ignace est flagrant. Tout cela pourtant n’est rien encore, c’est l’article 4 qu’il faut surtout consulter ; le voici, je donne d’abord le titre : Mesures à prendre pour faciliter l’exercice des soins spirituels. Maintenant, sous ce titre, deux propositions ont été faites ; je traduis : 1° pour faciliter aux autorités ecclésiastiques la connaissance individuelle de leurs ouailles, il sera institué des registres spirituels qui seront d’abord dressés par les autorités civiles, puis continués par les autorités ecclésiastiques, et qui contiendront des notes sur chaque individu ; 2° pour faciliter les rapports des ecclésiastiques avec leurs ouailles, les ministres auront le droit de mander chez eux les fidèles, il sera institué des visites domiciliaires qui auront lieu régulièrement, et la confession auriculaire sera rétablie. Le septième article et le dixième reprennent avec plus de détail les mêmes prétentions monstrueuses, afin qu’il n’y ait pas de doute, et que le joug odieux qu’on prépare soit bien connu de ceux qui l’accepteront. En cela du moins, le piétisme a montré une franchise qu’on ne lui contestera pas.

La lutte s’engagea avec vivacité ; les piétistes avaient trop compté sur l’influence du gouvernement et sur la terreur que devait inspirer à leurs adversaires le déploiement de toutes leurs forces. La résistance fut opiniâtre, invincible. L’assemblée, à une majorité considérable, commença par écarter les incroyables propositions que je signalais tout à l’heure ; elle ne permit pas qu’on les discutât, et il fut décidé qu’on délibérerait seulement sur l’article 9, lequel traitait de la constitution générale de l’église. L’audace des piétistes irrita l’extrémité opposée du synode, l’extrême gauche, si je puis ainsi parler, le côté démocratique, qui se montra bientôt et réclamai l’organisation presbytérienne. Cette opinion, bien que soutenue avec un vrai talent, fut repoussée ; l’assemblée s’appliqua à suivre une ligne droite entre les deux partis extrêmes, et l’on exprima le désir que les deux organisations, presbytérienne synodiale, fussent sagement combinées. Mais il s’agissait surtout de frapper le piétisme ; or, il fut déclarer en même temps que toute constitution non empruntée aux traditions de l’Allemagne serait rejetée obstinément. C’était écarter à jamais l’anglicanisme, le puseyisme, et arrêter dans ses folles entreprises une secte de plus en plus menaçante. Ce n’est pas tout : les piétistes, appliquant