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de si grands évènemens. L’insurrection irlandaise, depuis long-temps préparée par les efforts réunis des catholiques, des presbytériens, des révolutionnaires, et par les excitations de la France, éclata enfin avec violence. Les autorités de Dublin, averties un peu avant le jour fixé pour le soulèvement, purent le prévenir dans la capitale en arrêtant ceux qui devaient le diriger, mais la révolte éclata simultanément sur tous les autres points du pays. Pendant un mois, l’Irlande vit livrer des combats acharnés, dans lesquels la discipline des troupes régulières triompha presque constamment du nombre et de l’aveugle fureur des masses populaires. Trop souvent, de part et d’autre, des massacres, des excès de toute nature, déshonorèrent la cause victorieuse. Des renforts considérables ne tardèrent pas à arriver d’Angleterre au secours du vice-roi. Un grand nombre de miliciens offrirent leurs services pour aller combattre la révolte. L’autorisation du parlement pouvait seule donner au ministère le droit de les envoyer hors du territoire de la Grande-Bretagne ; cette autorisation, demandée aux deux chambres au moment où elles allaient clore leur session, fut accordée avec empressement malgré les objections des adversaires du cabinet, qui dissimulaient assez mal leur complaisante indulgence pour les Irlandais rebelles.

Lorsque ce vote fut rendu, l’insurrection était déjà expirante. Vaincus le 20 juin à Vinegar-Hill, dans un combat décisif, les insurgés furent chassés de Vexford, où ils avaient établi leur quartier-général, et depuis ce moment les engagemens qu’ils eurent encore avec les troupes anglaises ne furent plus pour eux qu’une suite de déroutes. Bientôt tout fut soumis. L’insurrection n’existait déjà plus, lorsque le général français Humbert, envoyé par le directoire pour la seconder, débarqua à Killala, amenant avec lui douze cents soldats, que d’autres divisions plus nombreuses devaient suivre à peu de distance. Il parvint encore à réunir quelques milliers de paysans auxquels il distribua des fusils et des uniformes, il obtint même quelques légers succès ; mais, entouré ensuite par des forces supérieures, il fut obligé de mettre bas les armes. Un second détachement arrivé peu après n’échappa au même sort qu’en se rembarquant précipitamment. Avant qu’on pût connaître en France le malheureux résultat de ces tentatives, une escadre française, composée d’un vaisseau de ligne, de huit frégates, de deux moindres bâtimens, et chargée de troupes et de munitions, se présenta encore sur la côte d’Irlande, mais elle y rencontra l’amiral Warren, qui, après l’avoir complètement battue, s’empara du vaisseau de ligne et de six des frégates.