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cette capitale. Pendant plusieurs mois, l’insurrection absorba en grande partie l’attention et les forces de la Russie, de la Prusse et de l’Autriche elle-même. Cette lutte, on le sait, eut pour résultat le dernier partage de la monarchie polonaise et l’anéantissement de son indépendance.

L’Autriche, occupée à s’assurer une part de cette riche proie, semblait elle-même, à l’exemple de la Prusse, ne plus apporter beaucoup d’ardeur à la guerre contre la France. Bien que, du côté des Pays-Bas, la campagne se fût ouverte pour elle par des succès, et que le prince de Cobourg eût encore emporté la place forte de Landrecies, on n’avait donné aucune suite à ce début victorieux. Le cabinet impérial était mécontent des Belges, qui se montraient peu empressés à seconder, par des sacrifices d’hommes et d’argent, les efforts qu’on faisait pour les mettre à l’abri d’une nouvelle invasion française ; il commençait à se demander si la possession de ces provinces éloignées et indociles valait tout ce que coûtait leur conservation, et s’il n’y aurait pas moyen de transiger avec la France à des conditions avantageuses. A Vienne comme dans la plupart des cours alliées, la pensée de traiter avec le comité de salut public ne paraissait déjà plus inadmissible. En voyant Robespierre renverser successivement tous ses ennemis, on commençait à croire qu’il fallait voir en lui l’homme appelé à terminer la révolution et à rétablir l’ordre par son énergique dictature.

Tandis que l’irrésolution pénétrait ainsi dans les conseils des alliés, la France, au contraire, redoublait de vigueur et d’audace. Ses nombreuses armées s’étaient aguerries. Leurs jeunes généraux exécutaient avec autant de talent que d’intrépidité les plans vastes et hardis que leur envoyait Carnot. Presque chaque jour Pichegru, Jourdan, Moreau, prenaient l’offensive contre les Autrichiens, les Anglais, les Hollandais, chargés de la garde des Pays-Bas, et, dans ces combats continuels, ils avaient le plus souvent l’avantage. La bataille de Fleurus fixa la victoire sous les drapeaux conventionnels. Le prince de Cobourg abandonna précipitamment Bruxelles et se retira au-delà de la Meuse, livrant ainsi aux Français toutes les provinces belges. Bientôt après, les Prussiens, qui, immobiles à Kaiserslautern, s’étaient refusés à venir au secours des Autrichiens, furent ramenés jusque sous les murs de Mayence. L’armée de l’empire, commandée par le duc de Saxe-Teschen, passa sur la rive droite du Rhin, renonçant à défendre le Palatinat.

Victorieux de tous côtés, les Français ne trouvaient plus sur le continent