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Grenville, qui fut lui-même remplacé par Dundas au département de l’intérieur. La Porte, abandonnée, se vit forcée de souscrire le traité de Galatz, aux conditions que la Russie avait depuis long-temps indiquées comme les bases nécessaires de la paix. Ce résultat humiliant pour l’Angleterre, dont il affaiblit l’influence dans l’Orient et dans le nord de l’Europe, eut encore une autre conséquence, que les imprudens adversaires de Pitt n’avaient pas su prévoir : la Russie, délivrée de toute entrave et devenue plus audacieuse par le succès même, put reprendre ses projets ambitieux contre la Pologne.

En cette occasion, Fox n’avait pas seulement manqué de sagacité, il avait été infidèle au sentiment de fierté nationale qui distingue d’ordinaire les Anglais. Ses torts auraient été bien plus graves, s’il fallait admettre l’exactitude d’une assertion fort répandue alors. Un homme qui lui était lié par la parenté et par l’amitié, qui a depuis occupé de hauts emplois diplomatiques, M. Adair, ayant fait un voyage à Saint-Pétersbourg pendant la durée des négociations ouvertes entre la Russie et la Porte, on prétendit qu’il s’y était rendu comme le représentant du chef de l’opposition pour contrarier les efforts de l’envoyé officiel du gouvernement pour contrarier les efforts de l’envoyé officiel du gouvernement, et pour avertir l’impératrice de ne pas s’inquiéter des menaces du cabinet. Fox et ses partisans ont toujours nié le fait. Ce qu’on peut supposer, c’est qu’il n’avait donné à son jeune parent qu’une mission d’observation ; mais il eût dû prévoir que le cabinet russe chercherait à s’en prévaloir pour persuader à l’Europe et à la Porte même qu’il avait en Angleterre, jusque dans l’intérieur du parlement, de puissantes intelligences. L’impératrice, en effet, affecta de considérer M. Adair comme un véritable agent diplomatique et de la traiter, en toute occasion, au moins aussi bien que l’envoyé du gouvernement anglais.

Au moment de la conclusion du traité de Galatz, il y avait déjà plus de deux mois que le parlement avait clos sa longue et laborieuse session. Dans l’intervalle qui s’écoula jusqu’à la session suivante, l’agitation révolutionnaire que répandait dans le pays l’exemple de la France fit des progrès assez sensibles. C’était surtout, nous l’avons dit, dans les sectes religieuses dissidentes, parmi les unitaires et les méthodistes, que les doctrines dont Thomas Payne s’était rendu l’organe trouvaient des adhérens. Ceux-ci formaient dans les diverses parties du royaume des sociétés organisées sur le même plan que celle des jacobins de Paris et engagées avec elle dans une correspondance régulière. Ils exprimaient hautement le vœu de voir accomplir en Angleterre une révolution semblable à celle qui avait déjà changé la face de