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président du conseil. Bien que ce dernier eût qualifié de trahison la doctrine exposée par Fox, les principaux légistes, ceux dont l’opinion faisait autorité dans cette assemblée, se partagèrent entre les deux principes contraires que Pitt et Fox avaient proclamés comme la base fondamentale du gouvernement constitutionnel de l’Angleterre.

L’opposition, dans son empressement à s’emparer du pouvoir en appelant le prince de Galles à la régence, avait commis une grande faute. Croyant couper court à toutes les lenteurs par l’invocation d’un principe absolu, elle avait fourni à ses adversaires l’occasion d’engager une discussion théorique qui entrait merveilleusement dans leurs vues et dans leurs intérêts, puisqu’elle leur permettait de traîner en longueur l’établissement de la régence, de garder provisoirement la direction du gouvernement, d’atteindre ainsi l’époque de la guérison du roi, si elle devait bientôt avoir lieu, et, dans le cas contraire, de profiter de ce retard pour créer des obstacles à l’action du parti auquel ils seraient forcés de remettre enfin la conduite des affaires. Fox ne tarda pas à s’apercevoir de l’erreur dans laquelle il était tombé. Le jour où le comité des précédens présenta son rapport, il expliqua qu’on avait mal compris sa pensée, que, s’il avait attribué, s’il persistait à attribuer au prince de Galles un droit personnel à la régence, il admettait en même temps que ce droit ne pouvait être reconnu qu’en vertu de l’adjudication du parlement, seul apte à constater la vacance du pouvoir exécutif ; entre ce système et celui qui attribuait aux chambres le droit d’élire le régent sans méconnaître la puissance des considérations qui désignaient à ce choix l’héritier du trône, il affecta de ne voir qu’une vaine subtilité, une pure querelle de mots dont il serait puéril de tenir compte ; il en conclut que le ministère ne devait pas tarder davantage à faire ses propositions pour l’organisation de la régence, et ne dissimula pas que, dans son opinion particulière, il fallait la doter de tous les pouvoirs de la royauté. Pitt, qui comprenait les motifs de ce langage si conciliant en apparence, ne s’y laissa pas prendre, Il répondit que le droit réclamé pour le prince n’avait aucun fondement, et il s’attacha à prouver ce qu’il avançait par des citations historiques. Loin de tomber d’accord avec Fox sur l’inutilité d’éclaircissemens ultérieurs, il fit voir qu’il ne s’agissait pas là d’une simple théorie, mais d’une question de pratique qu’il fallait résoudre avant tout, puisque de la solution qu’elle recevrait dépendait le droit que pouvait avoir le parlement de limiter les attributions de la régence. Il ne fit pas difficulté de déclarer d’avance que, dans sa manière de voir, elle devait être déférée à une seule personne, que