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depuis, le choléra est venu faire parmi eux d’épouvantables ravages, et cependant le recensement de 1841 donne 436,495 esclaves, c’est-à-dire un accroissement de 43 1/2 pour 100 pour les quatorze années, et il est notoire que les propriétaires ont dissimulé au moins la moitié de leurs nègres, le bruit s’étant répandu que le gouvernement ne faisait faire le recensement de 1841 que pour établir une taxe sur les esclaves. Les autorités locales évaluent à 750,000 au plus bas les esclaves de Cuba ; mais le chiffre officiel même offre, avec ce qu’il aurait dû être, une différence assez notable pour suffire à notre démonstration. A raison d’une perte annuelle de 8 et demi pour 100, la population esclave aurait dû être réduite, en 1841, à 82,725 ames ; elle était au contraire portée à 436,495, ce qui donne une différence de 353,670, qui ne peut s’expliquer que par l’introduction de nouveaux nègres ; et si nous divisons cette différence par le nombre des quatorze années, nous retrouverons précisément ce nombre de 25,000 que nos calculs nous avaient conduit à adopter par une autre voie. On peut ajouter, comme preuve de l’étendue de la traite à Cuba, que la majorité des négriers capturés sur la côte d’Afrique appartient à cette île ; ainsi, en 1834 et 1835, sur trente négriers condamnés par la cour de Sierra-Leone, vingt et un avaient Cuba pour destination.

Nous n’avons aucun renseignement précis sur l’état de la traite à Porto-Rico. A l’époque de l’émancipation, un très grand nombre de nègres des colonies anglaises furent introduits clandestinement à Porto-Rico, et même, depuis l’émancipation, chaque année un certain nombre d’apprentis ont été enlevés et transportés dans cette île. Un neuvième des négriers capturés est destiné pour Porto-Rico, et un commerce assez actif a lieu entre cette île et celle de Saint-Thomas, un des plus considérables marchés d’esclaves. C’est à ce trafic qu’il faut attribuer le développement des cultures à Porto-Rico et l’accroissement rapide de sa population esclave. En 1820, elle montait à 20,191 ames ; en 1831, à 41,819 ; en 1836, à 60,000. On évalue fort diversement la traite qui se fait dans cette île. Les chiffres varient de 7,000 à 12 et 15,000. Nous resterons au-dessous de l’évaluation la plus modérée ; nous prendrons le chiffre de 5,000, ce qui, pour les deux îles de Cuba et de Porto-Rico, nous donnera un total de 30,000 esclaves.

A en croire les abolitionistes anglais, la traite se ferait avec activité au Texas. Il paraîtrait en effet qu’en comparant le nombre d’esclaves donné par le dernier recensement avec le recensement antérieur et le chiffre des esclaves introduits légalement par la frontière des États-Unis, on trouve une différence assez sensible, qu’on explique par la