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VOYAGE ARCHÉOLOGIQUE À NINIVE.

mosquées d’Ispahan ou du Caire. Il y avait donc à Ninive une idée de superposition au moyen de briques qui avançaient les unes sur les autres, ainsi qu’au temple d’Ammon-Ra à Thèbes. De là il n’y a qu’un pas à la voûte simple, qui est le perfectionnement de cet empiétement par la coupure des angles ou par la pose des briques sur champ, dirigées vers un centre.

Une autre remarque m’a fait croire à la couverture en voûtes des palais de Ninive : c’est l’ensevelissement de ces palais et la quantité de détritus qui ont encombré l’intérieur des salles, encombrement qui s’expliquerait en grande partie par l’affaissement de ces voûtes, dont la construction aurait dû nécessiter l’emploi d’une énorme quantité de briques. Je finirai en disant que je ne vois pas pourquoi on n’admettrait pas qu’un peuple qui a su employer la brique avec tant d’art, la couvrir d’émaux et de dessins de toute sorte, se servir du bitume, fondre les métaux, travailler le fer, tailler la pierre et la sculpter avec une habileté qui étonne, pourquoi on n’admettrait pas qu’un tel peuple fût assez ingénieux pour construire des voûtes en briques, et pourquoi on voudrait en laisser l’honneur aux Perses, par exemple, chez qui l’art était en décadence, et qui, dès l’époque à laquelle on fait remonter les constructions de leurs voûtes, ne nous ont laissé que des monumens grossiers ? Laisserait-on plutôt cet honneur aux Étrusques, qui ont imité les Grecs de l’Asie, et n’ont eu de civilisation que par les copies qu’ils se sont appropriées ? Il me semble qu’il y a dans une telle opinion à la fois injustice et incrédulité systématique ; car, de ce qu’il a manqué jusqu’à ce jour des preuves authentiques, il ne s’ensuit pas que le fait n’a pu être.

On doit concevoir d’ailleurs que, quelle que soit la solidité du ciment employé à la liaison des briques qui ont formé la voûte, je n’aie pu retrouver de segment conservé ; ces briques se sont nécessairement séparées en tombant. Cependant il m’est arrivé fréquemment de remarquer l’assemblage de plusieurs briques qui avaient glissé les unes contre les autres, sans s’être tout-à-fait disjointes, comme auraient pu faire des portions d’arc en tombant ; et si celles dont je parle, ayant 0,45 mètres de largeur, n’ont pas fait partie des voûtes, je ne comprends pas à quelle portion de l’édifice elles ont appartenu, car elles n’ont pu former la frise qui reposait sur des plaques de pierre de 0,20 seulement d’épaisseur ; et d’ailleurs j’en ai retrouvé d’autres plus étroites qui, par leurs dimensions, devaient s’adapter parfaitement sur le haut du revêtement.

Telles sont les observations qui me font regarder comme cer-