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VOYAGE ARCHÉOLOGIQUE À NINIVE.

D’après les termes du hatti-cherif de Gulhané, les pachas investis du pouvoir dans les différentes provinces de l’empire, doivent administrer au nom du sultan, rendre compte de tous leurs actes au divan, et percevoir les revenus pour le trésor impérial, à la charge pour le gouvernement de pourvoir à toutes les dépenses administratives. Toutefois, par une restriction dont on a cru trouver le motif dans le caractère turbulent et l’esprit d’indépendance des provinces du Kurdistan et de l’Arabistan, sans que, depuis longues années, elle se trouve d’ailleurs justifiée, l’empereur a excepté les deux pachaliks de Bagdad et de Mossoul, qui restent toujours soumis à l’ancien régime. Aussi les pachas y commettent-ils toutes les exactions que leur inspire leur rapacité. Il n’y a pas jusqu’aux bijoux ou aux habits des femmes qu’ils n’enlèvent pour grossir leur kaznèh.

Méhémet-Pacha étant donc mort, le consul était rentré en possession paisible de sa chaumière, sans que peut-être les idées de son successeur fussent différentes au sujet des trésors de Sardanapale. Mon premier soin, en arrivant, fut d’étudier la configuration du monticule, de le mesurer pour avoir une idée de l’étendue qu’avaient dû occuper les édifices qu’il recélait, et de m’assurer de leur périmètre présumable. Je trouvai que cette éminence, qui portait des traces évidentes de constructions partant de sa base, offrait encore une forme assez régulière à angles droits. La longueur était de 300 mètres sur une largeur moyenne de 150, ce qui donnait une superficie de 45,000 mètres carrés. Restait à savoir si, sous cette immense étendue de terrain, on trouverait partout des ruines, et partout des restes intéressans. Au premier aperçu, je ne le pensai pas. En effet, la surface de ce monticule était très irrégulière ; il y avait, et notamment du côté où M. Botta avait attaqué, des parties coniques très élevées qui indiquaient des monumens encore sur pied, tandis que, dans d’autres, le sol, très bas et déprimé, se rapprochant du niveau de la plaine, nous laissait peu d’espoir de trouver des murs debout, ou même renversés, à la place qu’ils avaient occupée.

J’ai dit précédemment comment M. Botta était arrivé à découvrir un des angles de cet édifice. Ses premières fouilles avaient été faites précisément à l’une des extrémités du monticule qui offrait le plus de chances favorables, c’est-à-dire dans la portion la plus élevée. De tout ce que M. Botta avait écrit à l’Institut sur les sculptures déjà retrouvées, il résultait qu’il avait mis, en partie, au soleil quatre salles et une portion notable d’une façade extérieure. Ce fut donc à l’endroit même où il avait déposé la pioche que je la repris, et là que je choisis