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M. Gaudichaud n’a pas tardé à répliquer. Sans entamer encore le fond même de la question qui il a déjà traitée à diverses reprises, il s’est contenté de critiquer la note du botaniste allemand, d’y signaler des contradictions qui, nous devons le dire, ne nous ont pas paru très évidentes. Dans cette cironstance encore, M. Gaudichaud est resté trop fidèle à ses habitudes. Cet académicien a modifié, sur quelques points, les doctrines de Dupetit-Thouars. Ce que ce dernier avait dit du bourgeon, il l’a dit de la feuille. C’est, on le voit, une simple extension ou mieux peut-être une exagération de la théorie dont nous avons donné plus haut une idée générale. Cependant M. Gaudichaud a cru pouvoir se regarder comme le fondateur d’une doctrine nouvelle. Dans les ouvrages, importans d’ailleurs, qu’il a publiés sur ce sujet, il ne parle guère que de sa théorie, faisant ainsi, ce nous semble, un véritable abus du pronom possessif, et la moindre communication, adressée à l’Académie en contradiction avec ses idées, est aussitôt relevée par lui comme une attaque personnelle dans des notes où l’on peut trouver plus que de la vivacité.

Sans doute M. Gaudichaud est un botaniste très distingué. Il a caractérisé avec plus de précision que ne l’avait fait Dupetit-Thouars le phyton ou individu végétal, il a étayé ses opinions d’un grand nombre de faits et d’expériences nouvelles : mais quels que soient les mérites de cet académicien, nous croyons qui avant lui il existait dans la science quelques principes vrais. A n’envisager même que la question actuelle, il est évident que sa théorie, dans ce qu’elle a d’essentiel, n’est autre chose que celle de Dupetit-Thouars. Les expériences fondamentales, les faits principaux sur lesquels elle repose, avaient été observés et publiés par cet illustre botaniste. Enfin, pas plus que son prédécesseur, M. Gaudichaud n’a encore répondu à toutes les objections que soulèvent ces doctrines. Pour rendre raison de certains phénomènes, il est obligé de recourir à des hypothèses très contestables, de regarder comme vidées en sa faveur des questions dont la solution n’a pas même été tentée. On voit que l’hésitation est encore permise, et les argumens de M. Gaudichaud gagneraient à revêtir une forme un peu plus douce, un peu moins empreinte de personnalité. Ramener tout à soi, se prétendre infaillible et jeter le gant à ses adversaires d’un air de provocation, c’est à la fois risquer de s’aliéner les esprits sérieux qui connaissent les difficultés de la science, être injuste envers ceux qui nous frayèrent la route où nous marchons, et introduire à l’Académie un mode de discussion qu’on ne saurait noir sans regret pénétrer dans cette enceinte.


Si l’homme peut espérer de soulever un jour le voile que des milliers de siècles ont jeté sur quelques-uns des grands phénomènes géologiques, c’est peut-être surtout par l’étude des animaux fossiles ; mais pour apprécier avec justesse les renseignemens que nous fournissent ces restes des créations antiques, il faut aussi tenir compte de certains faits qui se passent sous nos yeux, et qui nous permettent d’apprécier les circonstances variées dans lesquels ont vécu ou sont morts les êtres qui peuplaient notre globe dans ces