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à toutes les analogies. Aujourd’hui il faut bien reconnaître que si, seuls parmi les mollusques, ils possédaient un appareil circulatoire complet, ils formeraient une exception unique et très remarquable. Nous devons ajouter toutefois que MM. Miln Edwards et Valenciennes ne se sont nullement prononcés relativement aux mollusques qui ont amené la discussion pendante entre nous et M. Souleyet. Membres de la commission chargée de juger le débat, ces académiciens n’ont pas voulu se séparer de leurs collègues. De son côté, M. Souleyet, confiant dans ses préparations, persiste dans ses opinions premières. Il est possible que sur quelques points ce naturaliste démontre que nous avons été induit en erreur. Marchant après nous dans une voie difficile, pouvant par conséquent se servir de nos travaux, il a pu voir plus et mieux. Si cela est, nous le reconnaîtrons sans peine. Corrigé par un successeur, nous ne croirons pas avoir à rougir pour partager le sort que subissent tous les jours les maîtres de la science, et, ne pouvant ressembler à ces grands hommes par le mérite, nous tâcherons au moins d’imiter la franchise avec laquelle ils acceptaient tout résultat bien constaté, lors même qu’il était contraire à leurs opinions.

Les faits que nous venons d’exposer n’intéressent pas seulement l’histoire des mollusques ; ils sont d’une importance réelle pour la physiologie générale. L’existence d’une circulation lacuneuse avait toujours paru incompatible avec celle d’une organisation élevée, et en la démontrant chez des animaux aussi compliqués que le sont les premiers mollusques, MM. Edwards et Valenciennes ont apporté un progrès très sensible à la science. Il devient aujourd’hui plus que probable qu’on la retrouvera chez les animaux les plus élevés, jusque chez l’homme lui-même dans certaines parties du corps. Elle seule en effet peut rendre raison de certains phénomènes dont l’explication était impossible jusqu’à ce jour. Peut-être permettra-t-elle de faire un pas vers la solution du grand problème de la nutrition. Or si l’on admet, ce que peu de personnes seront sans doute disposées à nier, que le médecin doit avant tout être physiologiste ; que pour donner à l’homme malade des soins éclairés, il faut d’abord connaître l’homme bien portant, on reconnaîtra sans peine de quelle utilité pratique peuvent être ces recherches que tant de gens prétendus positifs regardent comme propres seulement à satisfaire une curiosité scientifique.


Bien que l’organisation des végétaux ne ressemble en rien, au premier coup d’œil, à celle des animaux, cependant il existe entre ces deux grandes classes d’êtres organisés des rapports très remarquables. Les mêmes fonctions essentielles se retrouvent chez les uns et les autres, et quelquefois s’accomplissent par des procédés qui ne sont pas sans une certaine analogie. Les plantes, par exemple, et en particulier les arbres de nos contrées, présentent une circulation presque complète. Les sucs nourriciers que leurs radicules puisent dans le sol pénètrent dans le tronc sous le nom de sève et le parcourent de bas en haut en suivant principalement l’intérieur du tronc et des branches.