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Cependant, derrière ces tours, on voit se prolonger un noble et gracieux édifice, vaste corps d’église terminé par un chevet d’où rayonnent de nombreux arcs-boutans, et interrompu vers le milieu de sa longueur par deux bras ou transsepts arrondis à leur extrémité. La forme de ces transsepts produit une succession de lignes courbes et serpentantes que l’œil se plaît à suivre, et communique à tout le corps de l’église une apparence de souplesse et de grace qui constraste admirablement avec le mâle aspect des deux clochers. Les proportions élancées du monument, la forme aiguë du toit, la riche dentelle qui se découpe en festons sur sa crête, tout concourt à vous persuader que c’est là une de ces brillantes églises créées dans un des siècles où le style à ogive unissait l’élégance à la fermeté ; mais bientôt vos yeux, si portant de l’ensemble sur les détails, vous font percevoir que toutes les ouvertures de la nef sont à plein cintre, et que, sauf dans deux étages des transsepts, dans quelques parties de l’apside, dans les deux tours et dans la façade, l’ogive n’apparaît pas sur l’extérieur du monument. Il est vrai que ces pleins cintres sont plus sveltes, plus élancés que ceux qui appartiennent à l’époque exclusivement romane ou bysantine. Aussi cette cathédrale de Noyon, quoique presque entièrement percée d’arcades semi-circulaires, ne produit extérieurement ni par l’ensemble de ses formes, ni par les détails de sa construction la même impression qu’un monument à plein cintre proprement dit.

Avant d’entrer dans l’intérieur de l’église, examinons de plus près ses parties extérieures, et d’abord ce vaste porche qui s’avance en terrasse et qui abrite sous son triple berceau de voûtes les trois portes de la nef. Bien qu’il nuise à l’unité de la façade en la coupant et en la masquant en partie sous certains aspects, il est d’un effet imposant ; c’est un noble péristyle qui ajoute à la profondeur de l’église, et qui prépare dignement à entrer dans le temple.

A gauche du porche, ce vieux bâtiment éclairé par cinq grandes ogives si richement encadrées et divisées par des moulures si nettes et d’un profil si pur, c’est l’ancienne salle du chapitre. Vis-à-vis, autour de la place, vous voyez huit lourdes et grandes portes cochères rangées symétriquement en demi-cercle, derniers et tristes témoignages de l’opulence des chanoines : c’est dans ces hôtels nouvellement bâtis que la révolution est venue les surprendre.

Derrière la salle du chapitre, il existe un ancien cloître, dont cinq travées seulement sont encore debout. Chacune de ces travées se compose d’une grande ogive subdivisée en quatre compartimens et ornée de trèfles rayonnans finement découpés dans la pierre. Au fond de la cour