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critique pour la Revue des Deux Mondes que celle où l’élément judiciaire ou judicieux commença en effet à se dégager, à se poser avec indépendance à côté des essais d’art et de poésie qu’on insérait parallèlement. Que la balance ait toujours été tenue dans l’exacte mesure, qu’il n’y ait eu aucun soubresaut, aucune irrégularité, nous ne nous en vanterons certes pas, et, si nous l’osions faire, ceux-là seuls nous croiraient, qui ne sauraient pas les difficultés inhérentes à tout recueil de cette nature, à toute publication collective paraissant à jour fixe, et dans laquelle un directeur véritable est toujours placé entre le reproche qu’on lui fait de trop imposer, et l’inconvénient, non moins grave, de trop permettre. L’essentiel, le seul point que nous tenions à constater, et que le public peut-être voudra bien reconnaître avec nous, est celui-ci : somme toute, et à travers les nombreux incidens d’une course déjà longue, la Revue a fait de constans et d’heureux efforts pour fortifier, pour s’améliorer, et, depuis bien des années déjà, pour réparer par l’importance des travaux en haute politique, en critique philosophique et littéraire, en relations de voyages, en études et informations sérieuses de toutes sortes, ce qu’elle perdait peu à peu en caprice et en fantaisie, ce qu’elle ne perdait pas seule et ce que les premiers talens eux-mêmes, le plus souvent fatigués en même temps que renchéris, ne produisaient plus qu’assez imparfaitement. Voilà le vrai ; et, de plus, il est résulté de ces années d’expérience et de pratique commune que cette doctrine critique, qu’on cherchait à introduire dès l’abord, s’est formée de la manière dont ces sortes de choses se forment le mieux, c’est-à-dire lentement, insensiblement, comme il sied à des hommes d’âge déjà mûr, qui ont passé par les diverses épreuves de leur temps et qui sont guéris des excès. Sans aller entre soi jusqu’à la solidarité entière, on est arrivé à un concert très-suffisant Qu’il y ait lieu, par instans en littérature, à une critique d’allure tranchée, plus dogmatique et systématique, plus dirigée d’après une unité profonde de principes, nous ne le nions pas, et simplement, sans exclure de son à-propos cette haute critique d’initiative, ce n’est point celle à laquelle la Revue d’ordinaire prétend. Si son but, à elle, peut sembler plus modeste, son procédé n’en doit être que plus varié, plus étendu, plus proportionné, nous le croyons, à ce que réclament les nécessités d’alentour. Elle voudrait, contre les excès de tout genre, établir et pratiquer une critique de répression et de justesse, de bonne police et de convenance, une critique pourtant capable d’exemples, et qui, sachant se dérober par intervalles au spectacle d’alentour, à ces combats de Centaures et de