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parages où les appellent leurs plus grands intérêts, où elles risquent le plus d’être compromises, où elles sont le plus éloignées des ressources qui leur sont propres ?

A considérer sous ce point de vue notre établissement maritime dans le Pas-de-Calais, l’horizon s’agrandit et les intérêts de localité disparaissent devant les intérêts français et européens. Ce n’est plus pour favoriser Calais, Boulogne ou Dunkerque que s’organise de grands travaux ; c’est pour ouvrir un abri large et sûr aux navires du Hâvre, de Nantes, de Bordeaux, de Marseille, qui se rendent dans la mer du Nord ; c’est pour donner une hospitalité digne de la France aux bâtimens anglais, hollandais, allemands suédois, russes, américains, qui se croisent en vue de nos côtes ; et si la guerre s’allume sur la mer, c’est pour ne point être au dépourvu à son foyer le plus ardent, c’est pour avoir, aux lieux où se décideront les grandes questions, un bassin où s’organise la victoire, où se répare la défaite.

Ceci ne serait pas plus une menace contre l’Angleterre que les projets de ports de refuge que l’amirauté fait étudier, par suite des délibérations de la chambre des communes, pour Beachy-Head, Douvres et Foreness ne sont une menace contre la France[1]. Nos voisins

  1. Report on the Survey of the Harbour of the South-Eastern coast. On a vu, page 782, la conclusion du rapport en ce qui se rapporte à Douvres.
    Le second port de refuge serait établi au cap Beachy, au nord de Fécamp et à l’est de Portsmouth : il consisterait eu un brise-lame curviligne de 3,060 mètres de longueur, établi à 2,000 mètres du rivage, par des profondeurs variables de 9 à 12 mètres à la basse mer de vive eau, avec des marées de 6 mètres 40 centimètres. Les passes ouvertes à l’est et à l’ouest auraient 1,800 mètres de largeur, et la digue serait opposée aux vents du sud, comme celle de la Bassure aux vents d’ouest.
    Enfin à Foreness, près Margate, sur le prolongement de la rive droite de la Tamise et à l’exposition du nord, deux digues enracinées au rivage, l’une, droite et longue de 1,190 mètres, l’autre, brisée à angle droit et longue de 2,810 mètres, embrasseraient un espace de 186 hectares. Une seule entrée ouverte au nord-ouest aurait 152 mètres de largeur. La ligne septentrionale serait fondée sur une longueur de 1,838 mètres à 10 mètres 50 centimètres au-dessous de la basse mer.
    L’exécution de chacun des trois ports de refuge est évaluée à 2 millions sterling, non compris les fortifications et les établissemens accessoires : ce serait en tout une dépense d’au moins. 160 millions de francs.
    Indépendamment de ce qui se rapporte spécialement à ces grands établissemens, le rapport contient des observations intéressantes sur les ports de Margate, de Broadstairs, de Ramsgate de Deal, de Sandwich, de Douvres, de Folkstone, de Rye, d’Hastings, de Cuxmere, de Newhaven, de Shorcham, de Littiehampton, de Pagham, qui font tous face aux côtes de France, et ont été visités par les commissaires.
    Une traduction de cette pièce importante a été insérée dans les Annales Maritimes du mois d’octobre 1844.