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et d’antiquités locales dont aucune de nos grandes villes de province ne possède peut-être l’équivalent ; une nombreuse collection de plâtres d’après l’antique, et une galerie de tableaux qui sans doute s’enrichira. Ces établissemens ont, si j’ose parler ainsi, le luisant que donne l’usage journalier. Les plâtres antiques servent de modèle à l’école de dessin ; les livres sont feuilletés ; le grand nombre de curiosités exotiques que renferme le cabinet atteste le goût de la population pour les voyages, et la bonne direction du patriotisme local se montre dans des collections où l’on peut faire une étude complète de la géologie du pays, ou suivre, à travers une série d’armes, de monnaies, d’instrumens divers trouvés sur le sol, l’histoire des vicissitudes dont il a été le théâtre à partir de la domination romaine. La Boulogne d’aujourd’hui fait bien de conserver avec un respect filial ces souvenirs de l’antique Morinie ; ils prouvent que son importance actuelle n’est point un accident, mais une conséquence des avantages de sa position géographique, et ceux-ci sont bien éloignés d’avoir produit tous les effets qu’il est permis d’en attendre.

Le port de Boulogne s’est fort amélioré depuis quinze ans. Les lois des 29 juin 1829, 30 juin 1835, 17 juillet 1837, 9 août 1839, ont affecté à l’exécution de projets hardis, et dont le succès a été complet, une somme de 3,750,000 francs. Les travaux conçus et exécutés par l’habile ingénieur M. Marguet pourvoient aux nécessités actuelles de la navigation, et se coordonnent avec les projets plus étendus dont son développement à venir pourra déterminer l’adoption. Dans son état actuel, Boulogne a sur les autres ports du Pas-de-Calais un précieux avantage : le plan d’équilibre des marées, c’est-à-dire celui qui tient le milieu entre la haute et la basse mer, y est plus élevé d’un mètre ; le chenal en est par conséquent plus long-temps praticable à chaque marée. Les bateaux à vapeur tirant deux mètres d’eau sont ceux qui desservent principalement ces ports, et il leur faut, à cause du tangage et de l’agitation des flots, de 50 à 60 centimètres d’eau sous la quille. Pour ces navires, le port de Boulogne est abordable à chaque marée, en moyenne, pendant sept heures trente-cinq minutes, tandis que ceux de Calais, de Douvres, de Folkstone, ne le sont que pendant six heures quinze minutes. Il suit de là que de deux bâtimens de même marche, effectuant dans une même marée le double passage du détroit, celui qui partira de Boulogne disposera d’une heure vingt minutes de plus, que celui qui partira d’Angleterre. Cet avantage considérable est atténué par l’exposition de la côte à l’action directe des vents d’ouest, les plus fréquens et les plus dangereux qui