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les chevaux de course, et les nôtres ont perdu de leur vitesse en vieillissant : ils sont aujourd’hui battus par la Princesse Alice, dont les traversées durent moyennement sept quarts d’heure. Grace à la loi du 4 août dernier, nous allons porter à 540,000 fr. la dépense d’un service qui n’en coûte que 180,000. Sans avoir besoin de beaucoup de place, ni de beaucoup de vitesse, nous aurons des paquebots spacieux et rapides ; et la vanité nationale sera satisfaite, si ce n’est sous le rapport des résultats, au moins sous celui de la dépense. La dimension des paquebots devrait se régler sur les masses à transporter : or, sur 393,349 passagers, embarqués ou débarqués à Calais de 1834 à 1843, les malles françaises n’en ont transporté que 50,983, ou un peu plus d’un sur huit : il n’y a pas lieu d’espérer qu’après l’ouverture du chemin de fer de Boulogne, qui s’appropriera toutes les provenances de Paris, ce rapport change à notre profit. Il résulte, en effet, d’observations faites depuis vingt ans, que sur vingt passagers entre la France et l’Angleterre, seize sont Anglais, trois Français et un étranger : les Anglais, alors même que nos paquebots sont préférables prennent invariablement ceux de leur nation, et entraînent avec eux presque tous les étrangers ; il est donc à craindre que nos paquebots de 150 chevaux ne portent, comme par le passé, que six ou sept personnes par traversée, et qu’un contraste fâcheux ne règne entre leur étendue et leur solitude. Quant à la vitesse, il n’est pas nécessaire de se presser beaucoup pour arriver avant le départ de la poste anglaise : nos malles partent de Calais, à une heure après-midi ; elles sont à Douvres vers quatre heures, et remettent immédiatement les dépêches à l’agent du maître de poste général : celui-ci ne les expédie pour Londres qu’à une heure du matin. Si ce retard de huit heures est indispensable pour l’exercice d’une faculté à laquelle, d’après des aveux récemment faits au parlement, le cabinet de Saint-James paraît beaucoup tenir, cela fait peu d’honneur à la dextérité des gens de police britanniques.

Suivant le traité du 14 octobre 1833, les dépêches partent de chaque pays sur des bâtimens de l’état qui ne chargent pas d’autres marchandises que les bagages des passagers. Cette restriction est toute à l’avantage du commerce anglais ; le nôtre, il est triste de le dire, n’a pas un seul navire vapeur qui fasse les transports au travers du détroit.

Nos paquebots dépendent de l’administration des postes, sont inspectés par les inspecteurs des finances, et fort bien commandés par des officiers de la marine marchande. Les paquebots anglais appartiennent à la marine royale. L’amirauté entretient sur le Pas-de-Calais