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sévèrement critiqué. On lui reproche d’avoir agi trop timidement. On eût voulu une réforme scientifique en même temps qu’une réforme administrative. Le maréchal a pensé qu’une réforme scientifique n’était pas nécessaire. Nous croyons, comme lui, qu’il est bon d’attendre l’épreuve d’une discussion approfondie avant de toucher aux bases d’une institution consacrée par le temps, et de changer les élémens qui ont fait jusqu’ici sa prospérité et sa grandeur.

Pour le moment, l’objet le plus pressé était de mettre un terne à ces regrettables conflits, dont le dernier a entraîne au mois d’août le licenciement de l’école. Tout le monde sait que ces conflits ont pris leur source dans le mode de nomination aux places de directeur, de professeurs et d’examinateurs. Sur ce point, l’ordonnance de 1832 renfermait un vice capital. En cas de vacance d’emploi, deux candidats étaient présentes au ministre, l’un par l’Académie des sciences, l’autre par le conseil d’instruction de l’école Quand les deux corps présentaient des noms différens, le ministre pouvait choisir, mais quand ils s’accordaient pour présenter le même candidat, ce qui arrivait fréquemment par la raison que la plupart des membres du conseil d’instruction faisaient également partie de l’Académie des sciences, l’intervention du ministre devenait illusoire : son choix était forcé, et sa responsabilité s’annulait devant les ordres émanés d’un pouvoir irresponsable. L’ordonnance du 30 octobre a fait cesser cette anomalie. Désormais le conseil de perfectionnement sera seul chargé de la présentation des candidats, et sa liste portera deux noms. De la sorte, le choix du ministre sera toujours libre. L’Académie des sciences conservera d’ailleurs une juste part d’influence dans les nominations, trois de ses membres, désignés par elle, feront partie du conseil de perfectionnement, et de plus elle sera représentée dans ce conseil par ceux des fonctionnaires de l’école qui sont en même temps académiciens. Ainsi se trouvent conciliés dans la nouvelle ordonnance le principe des candidatures, qu’il était utile de maintenir, l’intervention de l’Académie des sciences, toujours précieuse pour l’école, et l’autorité du gouvernement, condition nécessaire de sa responsabilité.

Personne ne doute que cette ordonnance ne soit bientôt suivie d’une autre qui rouvrira les portes de l’école aux élèves licenciés il y a quatre mois. Tous les organes de la presse ont conseillé à M. le maréchal Soult et cet acte d’indulgence qui serait justifié par des circonstances exceptionnelles, et ne pourrait, par ce motif, porter atteinte à la discipline. Espérons que le maréchal ne se fera pas prier trop long-temps.

La querelle de la magistrature et du barreau est heureusement terminée. On ne peut qu’applaudir aux différentes manifestations qui ont mis fin à cette déplorable lutte. Les paroles du procureur-général ont été fermes en même temps que conciliantes. Celles du président Séguier, sans cesser d’être dignes, ont accordé une juste satisfaction à des susceptibilités légitimes. Le conseil de l’ordre a tenu jusqu’au bout une conduite qui lui fait honneur. En se rendant à l’audience solennelle de rentrée, il a témoigné de son respect