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mieux aimé régner constitutionnellement, sur l’Italie centrale que de perdre son modeste duché par excès de fidélité à l’absolutisme et à l’Autriche. Cet épisode n’eut aucune suite ; bientôt Ciro Menotti se vit trahi par le duc, et lorsqu’il se soulevait le 3 février, à la tête de trente conspirateurs, il était canonné, enveloppé par les troupes ducales. Le 4 février 1831, la révolution, préparée par les carbonari éclate à Bologne, se propage avec la rapidité de la foudre dans les Légations, dans les Marches, dans l’Ombrie ; vingt villes s’insurgent. Le duc de Modène s’enfuit à Mantoue avec un escadron de cavalerie, il emmène Ciro Menotti prisonnier ; le 6 février, la révolution atteint Modène ; le 14, elle éclate à Parme, et la duchesse se retire à Plaisance. On s’attendait à une insurrection de la Toscane, du royaume de Naples et du Piémont. Malheureusement la révolution n’était forte qu’à Bologne et dans les quatre Légations ; l’unique pensée du ministère révolutionnaire de Bologne, présidé par l’avocat Vicini, fut de s’appuyer exclusivement sur le principe de la non-intervention au-delà des limites de la Romagne. Le gouvernement provisoire ne songea donc pas à agiter la Toscane ; il envoya, au contraire, un ambassadeur pour entretenir de bonnes relations avec le grand-duc ; il refusa de secourir Modène attaquée par les Autrichiens, car, disait-il, la cause des Modenais n’est pas la nôtre : il ne voulut pas même se jeter sur Rome ; à son avis, Rome formait un état séparé de l’ancienne république de Bologne. Enfin il ne voulut intervenir nulle part, il arrêta la propagande, il amortit l’élan des campagnes en renvoyant les paysans qui offraient leurs bras, il contint les jeunes gens qui frémissaient d’impatience, il désarma le général Zucchi, qui arrivait avec sept cents Modenais pourchassés par les Autrichiens, et il ne songea pas même à fortifier Ancône, comme il s’était héroïquement décidé à ne pas se défende A l’approche de l’armée autrichienne, forte de douze mille hommes, on se rallia autour de Zucchi : il était trop tard. A Rimini, les insurgés acceptèrent le combat avec courage, mais le ministre de la guerre ordonnait presque aussitôt le désarmement définitif. Pendant les quarante jours de la crise de 1831, le cardinal Bernetti ordonnait au cardinal Benvenuti de lancer les sanfédistes sur le gouvernement provisoire, et de prêcher le massacre des libéraux. La lettre ayant été interceptée, on avait emprisonné Benvenuti. Le gouvernement provisoire, réfugié à Ancône, capitula avec le prisonnier et se rendit ainsi au représentant du sanfédisme et du brigandage pontifical. La capitulation fut violée, comme on pouvait le prévoir, et une partie des insurgés fut écrouée dans les prisons de Venise.