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Polcevera, dispersés facilement par le général Duphot. Lucques, à son tour, fut conquise à la démocratie en 1799. Trois ans auparavant, la révolution avait pénétré à Reggio, et de là elle passait à Modène, déjà abandonnée par le duc. Les États Romains avaient déjà perdu Bologne et Ferrare, qui s’étaient révoltées contre le gouvernement pontifical, lorsqu’en 1799 l’armée française arriva sous les murs de Rome, et proclama la république sans rencontrer d’autre opposition qu’une émeute de Transtévérins. A Naples, les conspirations des libéraux avaient commencé en 1791, et avaient pris un développement considérable en 1795. En 1799, la police, dressait une liste de vingt mille suspects. En présence des manifestations libérales, le roi se jeta dans une réaction théocratico-féodale, ordonna des persécutions, pilla les banques publiques pour lever une armée, et crut que le moment était bien choisi pour écouter les conseils de l’Angleterre et provoquer l’armée française dans les États Romains. A la première rencontre, cinquante mille Napolitains se débandèrent ; le roi s’enfuit à Naples, puis en Sicile, et le général Championnet marcha sur Naples avec un corps de huit mille hommes. La populace de Naples, plus royaliste que le roi et que les fonctionnaires, voulut résister aux Français ; elle fut héroïque, mais les libéraux napolitains, dont la cause était celle de la France, la foudroyèrent avec les batteries du fort Saint-Elme, et la populace, prise entre deux feux, dut céder. La soumission de Naples entraîna peu à peu celle des provinces, et ainsi fut achevée l’invasion de la péninsule.

Le résultat apparent de cette première révolution fut d’établir en Italie le régime démocratique. Toute la péninsule se couvrit de républiques, tous les états se réorganisèrent sur le modèle de la république française. C’était à Naples la république parthénopéenne ; les États Romains formaient la république romaine ; dans la Haute-Italie, on constituait les républiques cisalpine, cispadane, transpadane, ligurienne, vénitienne ; le Piémont s’unissait à la France. Le résultat réel et décisif de l’invasion fut de changer les données de la politique italienne, et de séparer nettement les trois partis qui depuis cinquante ans se développent et se combattent en Italie.

Le plus fort de ces trois partis était alors, comme aujourd’hui, celui des anciens gouvernemens. Il ne lui avait manqué que d’agir avec ensemble pour comprimer l’essor révolutionnaire et combattre avec succès l’invasion française ; mais les princes, les républiques et la cour de Rome, en résistant à Bonaparte, n’avaient écouté que les conseils de la vieille politique italienne. Rien n’était plus contraire à l’unité