Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 8.djvu/486

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jeté par terre, devant eux, un paquet de tiges de tabac, présent accoutumé dans ces occasions. Le spectacle de cette danse, exécutée par une magnifique soirée, sur les bords du Missouri, était des plus intéressans. Un clair de lune resplendissant illuminait ces vastes solitudes, dont les jeux bruyans de l’Indien et les cris du tête-chèvre interrompaient seuls le silence.

M. Washington Irving, dans les conclusions du curieux ouvrage qu’il a publié sous le titre d’Astoria, reconnaissant sans doute combien la colonisation du territoire de l’ouest offrait de difficultés, propose d’établir à travers ces vastes contrées une grande route commerciale qui franchirait les Montagnes Rocheuses, et qui relierait au territoire de l’Union l’Orégon et les rives de l’Océan Pacifique. Cette route, qu’il proclame comme la plus directe entre l’Europe et la Chine, serait défendue par une ligne de postes fortifiés, commandant le cours des fleuves, les passages et les déifiés des montagnes, et se protégeant mutuellement. Si la route de M. Washington Irving est un jour ouverte, nous doutons qu’elle soit jamais très fréquentée, surtout par les commerçans européens qui se rendent en Chine. Toujours est-il que plusieurs des forts qui pourraient la défendre existent dès à présent. A partir des limites du territoire des Indiens libres jusqu’aux cataractes du Missouri, c’est-à-dire sur un espace de plus de 1,500 milles, six de ces forts ont été en effet successivement construits sur les rives du Missouri. Le camp de Leavenworth et les forts Lookout, Pierre, Clarke, Union et Mackenzie, seront peut-être un jour les principales stations de la grande route commerciale de M. Washington Irving. Nous verrons tout à l’heure quelle est aujourd’hui la nature et l’importance de chacun de ces établissemens.

Du camp de Leavenworth au fort Lookout, la distance est d’environ 450 milles. Quatre grandes tribus se partagent cette partie des prairies de l’ouest, les Otos, les Omahas, les Puncas et les Dacotas. Les Omahas, avec lesquels nous avons déjà fait connaissance, sont, après les Dacotas, la plus importante de ces tribus. A mi-chemin du camp de Leavenworth au fort Lookout, et au centre du district des Omahas, s’élève sur le sommet d’une colline qui domine le fleuve un tumulus de forme conique, où l’un des plus fameux chefs du pays Wha-Schinga-Sabas, l’Oiseau-Noir, a été enterré. Ce chef, dévoué aux blancs, passait pour sorcier et régnait par la terreur. L’arsenic, qu’il employait d’une façon mystérieuse et terrible, était son unique sortilège. Au moyen de doses habilement préparées, il se débarrait à temps de tout rival et de tout ennemi. Enlevé, avec une partie de