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L’Orégon est cette vaste et magnifique partie de l’Amérique septentrionale comprise entre les Montagnes rocheuses et l’Océan Pacifique d’un côté, et bornée, d’autre part, par la Californie vers le sud, et la Nouvelle-Bretagne vers le nord. L’Orégon est la seule partie de l’Amérique du Nord par laquelle les États-Unis touchent l’Océan Pacifique ; et s’il existe dans l’Union une cause nationale, c’est celle qui reporte, des Montagnes Rocheuses où l’Angleterre voudrait les poser, les limites du territoire américain aux rives du grand Océan. L’Angleterre, dont les colonies commerciales ont occupé sans façon le territoire en litige, a élevé de sérieuses difficultés, et combat avec ténacité les prétentions des États-Unis ; mais l’Angleterre devra céder, surtout si, comme les nouvelles les plus récentes paraissent l’Indiquer, les États-Unis consentent à une sorte de partage, dans lequel, il est vrai, ils se feraient la part du lion.

L’Orégon a été souvent exploré. Un travail intéressant, qui a été publié dans cette Revue.[1], offre un tableau fort exact de cette contrée. La question politique de l’occupation et les avantages qu’elle pourrait apporter à l’Union américaine y sont judicieusement discutés. Peut-être n’a-t-on pas, toutefois assez tenu compte des difficultés que les États-Unis trouveraient à tirer tout le parti possible de leur acquisition. Ces difficultés sont de diverses natures. D’une part, l’immense étendue des pays qui séparent de l’Orégon les derniers établissemens que la civilisation a formés vers les prairies de l’ouest, et la constitution physique de ces contrées ; d’autre part, l’hostilité sourde ou déclarée des tribus indiennes qui de temps immémorial habitent ces solitudes, ou qui, chassées par la civilisation, y ont trouvé, un refuge, hostilité politiquement entretenue par des rivaux de commerce, ajournement long-temps encore les résultats avantageux que promet l’occupation. Quoique relié par les Montagnes Rocheuses au territoire du haut Missouri, l’Orégon, pendant bien des années, peut-être même à tout jamais, devra être considéré plutôt comme une lointaine colonie des États-Unis sur l’Océan Pacifique que comme un des états de l’Union.

Ces vastes contrées du centre de l’Amérique septentrionale, qui s’étendent sur une largeur de quatre à cinq cents lieues, à partir des grands lacs jusqu’au golfe du Mexique, et sur une profondeur égale, à partir des derniers établissemens vers l’ouest jusqu’aux Montagnes Rocheuses, ne sont guère parcourues que par les agens de la compagnie

  1. Voyez, dans la livraison du 15 mai 1843, le Territoire de l’Orégon.