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cependant il n’en est pas moins très désirable et très important que le même résultat soit obtenu aux moindres frais possibles. Ainsi tout pays enlève à la culture et frappe de stérilité une portion de ses terres, même les plus fertiles, pour les consacrer à la construction de routes et de canaux, et en cela il fait bien, parce que ces routes et ces canaux, en favorisant le transport des produits, donnent aux autres terrains mis en culture un accroissement de valeur qui compense largement le sacrifice que l’on s’impose ; mais il est évident que ce sacrifice doit se renfermer, dans la stricte limite des besoins, et qu’il est toujours bon d’en diminuer l’étendue quand on peut le faire sans diminuer les avantages que l’on en tire. Il en est de même des monnaies.

Si l’on veut mesurer d’un seul coup-d’œil toute l’importance des économies qu’il est possible de réaliser dans cette direction, il suffit de comparer la situation respective de l’Angleterre et de la France. Quoiqu’il y ait en Angleterre moins de population qu’en France, on accordera bien sans doute que la masse des affaires qui s’y traitent est pour le moins égale, que la sommes produits n’est pas moindre, que les échanges sont aussi nombreux, aussi actifs, que par conséquent le besoin d’un medium circulant est aussi étendu. Cependant tous les calculs des économistes et tous les documens officiels s’accordent à établir que la masse de numéraire dont l’Angleterre fait usage dans ses transactions n’excède pas la somme de 750 millions, tandis que la France emploie, pour arriver au même résultat sans jouir de facilités plus grandes, et, même, comme nous le verrons dans la suite, avec des facilités moindres, un capital qui n’est pas estimé à moins de 3 milliards et demi, c’est-à-dire que pour remplir le même service, la France emploie un capital quatre fois plus grand : circonstance fâcheuse, qui accuse un système financier très imparfait, et grève le revenu annuel de la nation d’intérêts considérables.

Le mouvement commercial de la France n’étant pas plus important en somme que celui de l’Angleterre, et il nous eût été permis de le supposer moindre, il est évident, que la France pourrait, à l’aide de meilleures dispositions économiques, suffire à ses échanges avec la même somme de numéraire circulant. Au lieu de 3 milliards et demi elle n’en que 750 millions dans ses échanges, et ces échanges s’accompliraient, selon notre hypothèse, avec autant de facilité qu’aujourd’hui. C’est donc ne somme de 2 milliards 750 millions quelle pourrait sans inconvénient détourner de cet emploi stérile pour la consacrer à des travaux reproductifs.

Partant de là, voyons ce que l’imperfection de notre système nous coûte.