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Cependant cette fonction dérive moins de l’essence de la monnaie que de ses propriétés accidentelles. Avant tout, elle est l’intermédiaire nécessaire dans les échanges ; voilà son caractère distinctif. Ce n’est, pour ainsi dire, qu’accessoirement, ou, pour parler comme les légistes, subsidiairement, qu’elle devient la mesure de la valeur. Il est bon de remarquer, au surplus, que cette mesure n’est jamais absolue, mais seulement relative ; car les monnaies, bien qu’elles soient en général plus stable que la plupart des autres marchandises, sont elles-mêmes sujettes à changer de valeur selon les temps.

Tels sont les principes généraux, principes clairs, incontestables, presque universellement admis, et sur lesquels il est aujourd’hui à peu près inutile d’insister. C’est quand on sort de ces données générales pour examiner soit les combinaisons du système monétaire soit la distribution et l’aménagement intérieur du capital métallique, qu’on rencontre partout l’incurie et le désordre. C’est alors qu’on vient se heurter contre des préjugés fâcheux qui résistent obstinément à l’application des saines doctrines. Les considérations que nous voulons présenter ici sont de deux sortes : les unes relatives à l’emploi économique de cette portion du capital social qui existe sous la forme de monnaie ; les autres, aux rapports à établir entre les divers métaux dont les monnaies sont composées.

Les monnaies, disons-nous, sont une marchandise, et les métaux précieux dont elles se forment ont une valeur intrinsèque qui subsiste en elles dans son entier. Aussi un peuple n’obtient-il celles dont il fait usage que par l’échange contre d’autres marchandises ; elles ne lui sont acquises qu’au moyen du sacrifice d’une portion de son capital actif. Il suit de là qu’un peuple n’a aucun intérêt à multiplier chez lui le numéraire au-delà de ses véritables besoins. Toute la somme de capital qu’il attire à lui sous la forme de monnaie, il la restitue aux autres peuples sous la forme d’autres produits équivalens. Ce n’est pas une augmentation de sa richesse, mais une simple transformation des élémens qui la constituent, transformation utile autant qu’elle répond a des besoins réels, mais fâcheuse toutes les fois qu’en excédant cette mesure, elle accumule chez un peuple une masse de numéraire qui doit rester stérile entre ses mains.

C’est encore ici une vérité assez clairement établie par les économistes et malgré quelques apparences, quoique les lois de certains états soient encore ordonnées aujourd’hui dans un esprit différent, nous croyons que cette vérité commence à triompher partout des préjugés contraires. Autrefois, lors des premières études faites en vue de