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à mesure que l’usage des échanges s’est étendu et généralisé, on a adopté partout, de préférence à toute autre marchandise, les métaux, et surtout les métaux précieux, qui sont devenus la monnaie par excellence. Cette préférence s’explique par les propriétés qui les distinguent. En effet, les métaux précieux résistent mieux à l’user que la plupart des autres marchandises ; ils ne sont pas sujets à s’altérer ; la qualité en est uniforme, ou peut être rendue telle par l’uniformité du titre ; ils peuvent facilement se mesurer et se diviser en parties aliquotes à volonté ; ils représentent une grande valeur sous un petit volume, et donnent ainsi moins d’embarras dans les maniemens et les transports ; enfin la valeur n’en est sujette qu’à des variations peu fréquentes et peu sensibles, et grace à cette circonstance, ils donnent, mieux que ne le ferait aucune autre espèce de marchandise, une base solide., aux transactions.

Pour rendre les métaux plus propres à l’usage auquel on les destine, on a coutume de les diviser en portions ou pièces régulières et symétriques, d’un poids, d’un volume et d’un titre légalement déterminés. L’une de ces pièces est choisie pur représenter l’unité, et afin de faciliter les comptes on a soin que toutes les autres pièces se rapportent à celle-là ; de manière qu’elles en soient ou des fractions régulières, ou des multiples exacts. Il est convenu partout que c’est au gouvernement qu’il appartient de régler cette division, et même de fabriquer les pièces : non que ce soit là, comme on l’a prétendu, un attribut essentiel de la souveraineté, mais parce que la garantie du gouvernement a paru meilleure qu’aucune autre, et que son intervention conduit à un système monétaire général et régulier. Par une conséquence naturelle de cette attribution, le gouvernement marque les pièces de son empreinte ; mais cette intendance qui lui est dévolue sur les monnaies n’a et ne peut avoir d’autre portée ni d’autre but que de faciliter les transactions, en établissant l’uniformité des pièces, et en dispensant les particuliers de vérifier, à l’occasion de chaque échange, leur titre et leur poids.

On considère aussi la monnaie comme une mesure de la valeur, et il est vrai qu’elle remplit cette fonction dans la pratique. C’est ainsi que pour donner une idée de la valeur d’une chose, on a coutume de la comparer à une quantité déterminée d’or ou d’argent, usage fort naturel d’ailleurs, puisque l’or et l’argent sont les marchandises communes contre lesquelles toutes les autres viennent tour à tour s’échanger. Ajoutons que cette marchandise est aussi la seule qui, en offrant des divisions régulières et fixes, se prête à des calculs précis.