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école, moitié religieuse, moitié politique, dans ses rapports avec les intérêts de l’empire ? Si les méthodistes sont ridicules et assez peu estimés dans leur patrie, comme l’a prouvé un exemple récent, s’il faut convenir avec M. Sydney, Smith qu’il importait à l’Angleterre d’arrêter leurs tentatives dans la presqu’île de l’Inde et d’empêcher que par eux le dogme du fatalisme et la division par castes, qui ont façonné les disciples de Brahma et de Mahomet à l’obéissance absolue, disparussent devant la liberté chrétienne, partout ailleurs ces religionnaires remuans ne sont-ils pas les auxiliaires les plus actifs de l’ambition des Anglais et les pionniers les plus hardis de leur immense empire ? Il faut bien le dire, l’anglicanisme ne peut s’en prendre qu’à sa tiédeur du zèle emporté des sectes dissidentes et du rang qu’elles ont pris comme instrumens de la grandeur nationale. Un membre du clergé orthodoxe ne saurait avouer cela tout haut, mais il doit bien reconnaître au fond du cœur que l’anglicanisme s’est laissé devancer dans toutes les grandes entreprises de réforme, de charité et de propagande chrétienne par les quakers, les méthodistes, les anabaptistes. L’église établie compte-t-elle une mistriss Fry, un Wilberforce ? A-t-elle, comme les wesleyens, fondé six sociétés de missionnaire pour la conversion des parens, sans compter ici les missions américaines ? Est-elle animée de leur ardeur d’expansion patriotique et religieuse, dont nous pouvons avoir à nous plaindre, mais que nous aurions mauvaise grace à déprécier ? Cette vénérable église établie a épuisé tout son feu contre les catholiques, et sa puissance de propagation va bien jusqu’à édifier quelques évêchés grassement dotés, à l’abri du pavillon de la patrie, jamais à l’aller planter avec la croix sur des terres nouvelles. Le révérend Alexander venant se fixer à Jérusalem avec la vescova et une foule de vescovini, au grand ébahissement des Turcs et des catholiques d’Orient qui, se figurent avec peine un pasteur sans autres ouailles que ses enfans, me semble représenter assez bien cette cérémonieuse et positive église anglicane, qui ne peut faire un pas sans son cortége de comfort, de bénéfices et de bagages domestiques. S’il fallait opposer à ce portrait l’activité politique, le patriotisme emporte, les rancunes, anti-papistes des sectes dissidentes, je n’aurais pas de peine à en trouver dans Exeter Hall la vivante et trop célèbre personnification.

Il est difficile de croire que M. Sydney Smith n’ait pas reconnu l’affinité qu’il y a entre la propagande religieuse des méthodistes et la propagande coloniale de l’Angleterre. La réserve que lui imposait sa qualité de clergyman ne lui aura pas permis d’examiner ce côté de la question. Cela est fâcheux ; un esprit tourné comme le sien vers l’utile