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même royaume en 1839 ; Sydney Smith, enfin, sont les écrivains qui, par leur collaboration active, par l’union étroite de leur talent et de leurs efforts, par la généralité de leurs essays critiques, ont fait le caractère et la célébrité de la Revue d’Édimbourg. Les autres, savans d’un mérite solide, y ont représenté les branches diverses des connaissances humaines, toutes ces nobles études qui jetaient au commencement du siècle un si vif éclat sur l’Athènes du nord. Aux noms cités dans la lettre de Jeffrey il faut ajouter celui de Playfair. Brown a occupé la chaire de philosophie morale illustrée par Dugald Stewart ; le docteur Thompson a été professeur de pathologie dans la vieille université écossaise ; l’autre Thompson, (celui qui est désigné sous le nom de Timothée) était simple advocate ; Alexandre Hamilton est devenu depuis professeur de sanscrit à Heyleybury, et Allen enfin, alors chirurgien à Édimbourg, est maintenant directeur du collége de Dulwich.

Si l’on songe qu’aux hésitations inséparables de tout commencement vinrent se joindre des difficultés d’exécution matérielle, on ne sera pas étonné qu’il ait fallu plus de six mois pour la composition du premier numéro de la Revue d’Édimbourg, et qu’elle n’ait enfin paru, qu’au commencement de novembre 1802. Parmi les promoteurs de ce recueil, il ne s’en trouvait aucun qui eût de la fortune et qui ne fût étranger en même temps, comme on l’est toujours avec des convictions, à tous ces vils calculs de l’intérêt qui perdent les entreprises de la pensée ; ils n’avaient qu’un but, c’était de communiquer avec le public ; cette passion triompha de tous les obstacles. Cependant leurs ressources étaient si restreintes, telle était la modestie de leurs espérances, qu’ils n’osèrent s’aventurer dans un premier essai plus de sept cent cinquante exemplaires. Ils eurent le bonheur de voir cette édition épuisée en moins de quinze jours. Ils avaient donc fait sensation, ils n’en pouvaient plus douter ; mais que pensait-on de la Revue et d’eux-mêmes ? Horner s’en préoccupe ; on retrouve la trace de cette inquiétude dans le journal où il consigne méthodiquement toutes ses réflexions à mesure qu’elles lui viennent : « Je dirai l’accueil que notre premier numéro a reçu à Édimbourg, car nous ignorons encore quelle aura été sa destinée à Londres. Au total, je ne crois qu’il nous ait fait beaucoup, d’honneur (I do flot think we have gained much character by it) : ce n’est pas qu’on l’ait trouvé sans mérite ; mais la sévérité des jugemens, l’esprit de dénigrement qui perce dans quelques articles, ont déplu à beaucoup de monde. Il faudra que nous adoucissions notre ton dans la prochaine livraison, et que nous montrions plus d’indulgence pour la sottise et le mauvais goût. Jeffrey est, de