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la Grèce, c’est la vente de Parga au pacha de Janina, au mépris de la foi promise après avoir, non pas conquis cette malheureuse cité, mais accepté le protectorat qu’elle offrait volontairement. Le second, c’est le secours qu’au début de l’insurrection, le gouverneur des îles Ioniennes prêta ostensiblement à l’armée des Ottomans.

Quand on s’est emparé des îles ioniennes, clé de l’Adriatique, il est d’ailleurs assez naturel qu’on voie sans plaisir se former tout à côté un état indépendant, dont les habitans, ont la même origine et parlent la même langue. Quand on prétend à la souveraineté maritime, il est assez simple qu’on favorise peu l’émancipation d’un peuple qui promet un puissant renfort aux marines secondaires. Or, la politique anglaise n’a jamais passé pour une politique enthousiaste, pour une politique qui sacrifie les intérêts aux idées ou aux sentimens. Aussi, le jour, où se posa la question des frontières, l’Angleterre vota-t-elle constamment pour qu’elles fussent aussi étroites que possible. Le Péloponèse et les Cyclades, voilà d’abord tout ce qu’elle donnait à la Grèce, et si plus tard elle accorda quelque chose de plus, c’est avec une répugnance visible, et parce que la Russie et la France avaient fini par se mettre d’accord.

Si l’Angleterre est peu favorable à la puissance de la Grèce, l’est-elle du moins à sa liberté ? Oui, quand le gouvernement résiste à son influence ; non, quand il s’y soumet. Ainsi, sous Capo-d’Istrias, à l’époque où l’influence russe était dominante, l’Angleterre s’unit à la France pour protester contre la tyrannie du président et pour réclamer une constitution, mais au comte Capo-d’Istrias succéda M d’Armansperg, dont l’Angleterre disposait. On vit alors, à Nauplie, en 1834, M. Dawkins, chargé d’affaires anglais, déclarer nettement à un envoyé français qu’une constitution ne valait rien pour la Grèce, et que, pendant long-temps encore, ce pays devait être gouverné par le corps diplomatique. On vit à la même époque lord Palmerston dénoncer à Vienne M. le duc de Broglie, qui, selon lui, faisait acte de folie en demandant, pour une nation si peu digne de la liberté, des institutions constitutionnelles. Il est vrai qu’après la chute de M. d’Armansperg le langage de l’Angleterre changea de nouveau, et que les idées constitutionnelles reprirent faveur auprès d’elle ; mais ainsi que l’avouait encore naïvement. M. Dawkins en 1834, ces idées étaient tout simplement une arme excellente pour combattre l’influence de la Russie. Il convenait donc, selon les circonstances, de se servir de cette arme ou de la laisser dans le fourreau.

Encore une fois, s’il est en Grèce, quelque chose d’inexplicable,