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cours de l’Europe, le marquis de Barbacena voulut rétablir ses affaires en désordre en venant diriger lui-même l’exploitation d’une mine d’or qu’il possédait dans la province. Malgré le nombre de ses esclaves, la richesse des veines qu’il rencontra, il ne fit que s’obérer : à sa mort, survenue en 1842, la plupart de ses esclaves étaient engagé à une espèce d’usurier d’Ouropreto, nommé Paulo-Santos, qui traitait les malheureux nègres avec une odieuse barbarie. Ce Paulo-Santo était, il y a quelques années, un misérable commis ; étant parvenu à se procurer quelque argent, il fit l’usure et ne tarda pas à s’enrichir. Les usuriers, très nombreux au Brésil, sont les seuls, qui, aujourd’hui, fassent fortune en peu de temps. Presque toutes les propriétés sont engagées, le taux de l’argent est de 2, souvent 3 pour 100 par mois ; en peu d’années, les intérêts absorbent le capital. Les seuls dangers que courent les usuriers sont dans l’expropriation ; aussi, pour se mettre à l’abri des vengeances, ont-ils des assassins à leurs ordres.

Je vis plus d’une fois, en traversant la petite rivière d’Ouropreto, de malheureux nègres occupés à retirer le sable qu’ils amassaient sur un des bords. Les parcelles d’or qu’ils dégagent du sable couvrent leurs frais de nourriture ; mais ils doivent travailler en tout temps, sinon un rival s’emparerait aussitôt de leur place, tous ayant un droit égal à occuper le lit de la rivière, qui est propriété publique. Je demandai à un de ces malheureux s’il était satisfait de son industrie ; il me dit qu’elle était rarement productive, des semaines entières de travail se passaient sans qu’il recueillît une seule parcelle d’or. Depuis que les lavages ne donnent plus que des produits insuffisans, la poudre d’or, qui avait long-temps servi de monnaie courante dans la province de Minas, a cessé d’être en usage, et on a supprimé un moyen d’échange qui était établi en faveur des travailleurs pauvres. Ouropreto a encore son ouvidor ; mais l’amalgame de l’or étant fait, soit par les compagnies anglaises, qui recueillent la plus grande quantité de ce métal, soit par les Brésiliens eux-mêmes, qui évitent ainsi le paiement des droits, l’ouvidor reçoit son traitement pour un emploi devenu inutile. De 1841 à 1842, les droits sur l’or, de 10 pour 100, ne se sont élevés qu’à 30,000 fr. ; les Brésiliens n’ont acquitté sur cette valeur que 2,000 fr., le reste des droits a pesé sur les compagnies anglaises, soumises en outre à un droit de 2 pour 100 à l’exportation. Il est remarquable que le droit de 10 pour 100 sur l’extraction ait produit une somme égale au droit de 2 pour 100 sur l’exportation. Cette égalité prouve qu’on a soustrait beaucoup d’or aux droits imposés. Quelle que soit la quantité de métal exportée, on doit admettre, en effet, qu’une somme assez