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épineuses, et deux de ces puissances ne peuvent pas regarder encore ces discussions comme terminées.

En 1493, une bulle du pape Alexandre VI traçait une ligne de démarcation imaginaire entre les possessions espagnoles et portugaises ; ainsi fut formé le territoire brésilien. La bulle d’Alexandre VI accordait au Portugal toutes les terres situées à cent lieues à l’ouest des îles Canaries. Plus tard, cette ligne de démarcation fut reportée à deux cent soixante-dix lieues des mêmes îles. L’Espagne refusa de reconnaître l’autorité du pape ; les discussions entre les deux puissances qui se disputaient la souveraineté du nouveau continent se prolongèrent jusqu’en 1754. À cette époque, on tomba d’accord que le confluent du Jaura et du Paraguay serait la limite occidentale du Brésil. Ainsi furent terminés les démêlés avec l’Espagne.

On ne put donner une solution également satisfaisante aux différends avec la France. En 1713, le traité d’Utrecht avait fixé la limite entre le Brésil et les possessions françaises. La rivière nommée le Rio-Oyapock, ou Vincent-Pinson, devait séparer la Guyane française du territoire occupé par les Portugais ; mais, par une mauvaise foi inqualifiable, le Portugal soutint plus tard que les limites de ses possessions s’étendaient jusqu’à une autre rivière qu’il lui plaisait de nommer aussi Vincent-Pinson. Lors des traités de 1815, la justice des prétentions de la France fut reconnue par toutes les puissances ; pourtant la question ne fut pas résolue. Plus récemment, le Brésil contesta de nouveau à la France le droit d’étendre ses limites jusqu’à l’Oyapock. Nous avons parlé de l’évacuation de Mapa ; c’est une satisfaction accordée aux exigences du Brésil appuyé par l’Angleterre. En vain le conseil colonial de Cayenne a protesté contre la décision du gouvernement en refusant d’allouer les frais d’évacuation ; on n’a pas tenu compte de cette manifestation significative, et le Brésil s’est vu encouragé ainsi dans ses injustes prétentions.

Ce n’est pas seulement la France et l’Espagne que le Brésil rencontre aux extrémités de son territoire, c’est l’Angleterre. Les limites entre les possessions anglaises et l’empire n’ont pas encore été fixées. L’Angleterre montre vis-à-vis du Brésil la prudence et l’habileté qui la distinguent en toute occasion ; elle ne se presse pas, nous l’avons dit, de faire déterminer la ligne qui doit séparer ses établissemens du territoire brésilien ; elle se contente d’avancer sans bruit dans l’intérieur. Le temps n’est pas venu pour elle de se montrer impérieuse et menaçante. Une fois maîtresse d’une des rives du Haut-Amazone, elle exigera du gouvernement brésilien qu’on lui laisse remonter le cours