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En 1549, Thomé de Souza, envoyé par le Portugal, vint jeter les fondemens de la capitale du Brésil, car Bahia n’a perdu que depuis un siècle le droit de servir de résidence aux vice-rois envoyés de Lisbonne. Alvarez soutint de ses conseils et de son influence le nouveau gouverneur ; il mourut entouré de l’estime générale. On admirait en lui cette mâle énergie, ces facultés puissantes qui semblèrent pendant un temps le privilège de la race portugaise. Aujourd’hui, il reste à peine un souvenir des anciens possesseurs de cette contrée fertile ; la race des Indiens qu’Alvarez commandait a entièrement disparu ; un monument consacré à la mémoire de sa femme dans la chapelle Da Graça, l’église la plus ancienne de Bahia, rappelle seul l’aventureuse destinée du chef portugais et de son intrépide compagne.

Après la mort d’Alvarez, la prospérité de Bahia grandit rapidement. La baie de Tous-les-Saints devint le port le plus fréquenté du Brésil, les bâtimens suffisaient à peine pour charger le sucre et le café déposés dans les magasins des riches négocians portugais. L’importance acquise par Rio-Janeiro put seule arrêter le développement commercial de Bahia. L’ancienne capitale lutta quelque temps encore avec la nouvelle ; puis l’indépendance du Brésil, la suppression presque absolue de la traite des noirs, et enfin la rébellion de 1837, vinrent consommer sa ruine.

La ville de Bahia est divisée en deux parties. La ville basse est le centre du commerce ; les magasins, les boutiques d’artisans animent cette longue rue étroite qui longe la plage, et où l’on respire les odeurs les plus nauséabondes. La douane et l’entrepôt où sont amoncelés tous les produits commerciaux de la province, l’arsenal et le chantier de marine, où l’on construit quelques bâtimens de guerre, les églises de la Conception et de Notre-Dame-du-Pilier, sont avec la bourse, les seuls édifices remarquables de cette partie de la ville. Les rues, étroites et malsaines, sont animées par les cris des noirs, qui portent de lourds fardeaux ou se disputent dans les nombreux cabarets avec des matelots ivres.

La ville haute, où l’on ne parvient qu’après avoir gravi une pente rapide, est moins fréquentée que la ville basse ; mais l’ensemble de ses constructions, d’une architecture noble et régulière, quoiqu’un peu massive, mérite de fixer l’attention du voyageur. Bahia est le siège de l’archevêque métropolitain du Brésil. De beaux édifices vous rappellent son ancienne opulence ; on remarque le théâtre, le palais du président, quelques églises. L’admirable vue de la baie, qu’on domine des hauteurs où s’élève la ville, complète heureusement le paysage. D’innombrables couvens attestent l’importance religieuse de Bahia. Le