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les ardeurs du soleil Traverser les bois vierges est pour les Brésiliens un sujet d’effroi ; aussi ne comprenaient-ils pas mon admiration pour ces belles solitudes que la main de l’homme n’a pas encore profanées. Rien n’est plus triste qu’un voyage à travers les campos. On ne voit de tous côtés que des plateaux arides, à peine quelques troupeaux errent-ils dans les plaines. On marche des heures entières avant de découvrir une habitation, qui presque toujours tombe en ruines.

Barbacena compte douze cents maisons et environ six mille habitans ; les négocians les plus riches avaient pris part à la révolte des Mineiros, et ils étaient en fuite Le climat de Barbacena est tempéré, presque froid. Nos fruits et nos fleurs, qui ne peuvent venir à Rio, réussissent à Barbacena La différence de climat s’explique par la position élevée de cette dernière ville. Les habitans élèvent des bestiaux et engraissent des porcs, quant à la culture, personne ne s’en inquiète J’en demandai le motif, on me répondit que les soins à donner aux bestiaux suffisaient à occuper la population. Barbacena n’a que peu de maisons à deux étages, toutes les autres sont basses et mal construites, mais régulièrement alignées. Les rues, larges et pavées, sont disposées en escaliers, tant la pente est rapide. Il y a huit églises appartenant à des confréries, aujourd’hui misérables ; ce sont de grands bâtimens sans architecture et dénués de luxe intérieur.

En se détournant de la route nouvelle qui mène de Rio à Ouropreto, on pourrait visiter une ville intéressante, Saint-Jean d’el Rey. Au dire de quelques voyageurs, la position et le climat de Saint-Jean d’el Rey offrent de précieux avantages, qui auraient dû faire choisir cette ville comme capitale de l’empire du Brésil, A Saint-Jean d’el Rey fut établie, la seule filature de coton qui ait été créée dans l’empire ; cette fabrique ne se soutint que durant peu d’années. Ses produits ne pouvaient supporter la concurrence avec les marchandises étrangères. Les mines d’or de Saint-Jean d’el Rey, si renommées autrefois, sont abandonnées. Il n’y a plus qu’un petit nombre de nègres libres qui s’occupent à laver le sable entraîné par les grandes pluies, pour en dégager quelques parcelles du métal précieux. Rarement ils trouvent assez d’or pour payer leur travail. L’extraction n’est plus un moyen de fortune à Saint-Jean, et la culture des terres a remplacé pour les habitans la recherche de l’or. Une compagnie anglaise, qui s’était formée pour l’exploitation d’une mine d’or près de la ville, a dépensé plus de sept cent mille francs sans résultats. On a dû renoncer à poursuivre les travaux, la veine d’or étant trop peu abondante pour couvrir les dépenses. Saint-Jean d’el Rey, n’étant plus sur le passage des caravanes, perd chaque