Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 7.djvu/659

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ces institutions aujourd’hui si vivement débattues dans les luttes parlementaires, et pour lesquelles ces mêmes hommes acharnés désormais à les battre en brèche versaient alors si volontiers leur sang. L’auteur du livre sur le Portugal ne pouvait manquer d’insister sur un point de cette importance. Son ouvrage est une sorte de galerie où figurent en pied les portraits de tous les personnages qui ont brillé à cette époque et depuis cette époque. Dom Miguel et dom Pedro, les ducs de Terceira et de Palmella, Costa Cabrai, tous défilent sous vos yeux, marqués au front de cet intérêt que les évènemens attachent à certains hommes. A peine en vue du bourg de Mindillo, l’écrivain, signalant un obélisque élevé là sur le rivage en mémoire du débarquement de dom Pedro, évoque les souvenirs de cette journée célèbre, où l’incroyable impéritie des autorités miguélistes fit la partie si belle à l’aventurier conquérant. Le 7 juin, sur le soir, un des gardiens du télégraphe de Villar da Paraiso allait clore son rapport de la journée, lorsqu’il aperçoit tout à coup, à l’aide du télescope, une partie de la flotte ennemie, et reconnaît environ vingt-huit voiles à l’horizon, au nord d’Oporto. A neuf heures, on bat la générale, et l’alarme est jetée partout. Cependant personne ne bouge et nul ne songe à s’opposer au débarquement, de telle sorte que dom Pedro entre le soir même et sans obstacle dans le petit port de Villa do Conda, où il met à l’ancre. Son équipage entier se composait de deux frégates, d’une corvette, de deux bricks, de quatre schooners et quarante-deux bateaux de transport, le tout monté par huit mille trois cents hommes, parmi lesquels se trouvaient environ quinze cents étrangers, ce qui réduisait à sept mille cinq cents le nombre des combattans à bord ; et c’était avec de pareilles ressources qu’un homme qu’on avait perdu de vue depuis des années s’avançait pour conquérir un royaume dont le régent commandait une armée de cinquante-cinq mille hommes et disposait d’une quantité de places fortes, de magasins et d’arsenaux, sans parler des avantages qu’offrait un des sites les mieux fortifiés par la nature. Le 8, dom Pedro envoie un parlementaire au brigadier Cordova, gouverneur de Vicenna, et qui jouissait de l’estime de tous les partis. Le parlementaire fut éconduit, et le message qu’il reçut répondit, pour cette fois, à l’idée qu’on se fait de l’honneur militaire. Ce premier échec ne laissa point de jeter quelque consternation parmi l’état-major de dom Pedro. Le lendemain, la flottille, abandonnant Villa do Conda, vint jeter l’ancre dans la baie de Mindillo, à deux lieues d’Oporto, et vers midi commença le débarquement sous les yeux des avant-postes du vicomte de Santa-Martha, dont la division de vingt-deux mille hommes, cantonnée dans Oporto et sur la rive du Douro, étendait jusqu’à Villa do Couda son aile droite. Les troupes miguélistes laissèrent ce débarquement s’effectuer le plus tranquillement du monde, et se contentèrent d’ouvrir, sur le soir, un feu de mousqueterie sans conséquence. A la première nouvelle de la marche de l’ennemi, Santa-Martha, qui n’avait pas moins de quatre mille hommes dans Oporto, traversa le fleuve et se replia sur Aliveira, abandonnant, outre