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service des arsenaux, elle ne répond pas au vœu exprimé par la commission de Brest. Celle-ci voulait un système de centralisation fortement constitué, garantie d’un ordre sévère et d’une responsabilité réelle. Le ministre, entravé sans doute par la résistance des intérêts et des préjugés traditionnels, a préféré maintenir le système des comptabilités éparses, détachées les unes des autres, et n’aboutissant à aucun centre commun, système condamné depuis long-temps par les abus qu’il a fait naître et qu’il perpétue. Cette ordonnance du 14 juin a été pour M. de Mackau la source de quelques ennuis secrets dont on a peu parlé, et qui se sont dissimulés à la faveur des grandes questions du jour. D’abord, il ne l’a publiée qu’après les instances réitérées des commissions du budget et du crédit de huit millions, toutes deux favorables au système de la commission de Brest. Puis, quand l’ordonnance a paru, la commission du budget avait déjà fait son rapport, où elle exposait sur le contrôle une opinion contraire aux bases de l’ordonnance. Plusieurs membres de la commission, vivement blessés, parlèrent alors de proposer à la chambre une réduction du crédit pour infliger un blâme au ministre. M. de Mackau a détourné adroitement l’orage, mais il a eu un moment des craintes sérieuses.

Pendant que l’on discute la marine, M. le prince de Joinville commande l’escadre destinée à agir, s’il y a lieu, sur le Maroc. M. le ministre des affaires étrangères a fait connaître les causes de la rupture et les projets du gouvernement. Abd-el-Kader est le principe du différend entre les deux états. Il a soulevé les Marocains contre nous par ses prédications fanatiques. Nous avons réclamé ; nous avons demandé son éloignement de notre territoire ; l’empereur, enchaîné par le fanatisme de son peuple, n’a pu faire droit à nos réclamations. Pour donner lieu à un prétexte de guerre, Abd-el-Kaer a fait surgir entre nous et le Maroc une question de limites. Nous avons dû repousser des prétentions injustes. Alors des rassemblemens de troupes ont été formés inopinément sur notre frontière. Envahis deux fois, nous avons repoussé l’agression, et, la seconde fois, le maréchal Bugeaud, pour constater la supériorité de nos armes, a poussé jusqu’à Ouschda, sans coup férir ; puis il est rentré sur Tlemcen, laissant au gouvernement le soin de faire la paix ou la guerre. Le gouvernement n’a aucune vue de conquête sur le Maroc ; l’Algérie lui suffit. Son but unique est d’assurer la sécurité de notre territoire. Pour atteindre ce but, il exige une satisfaction et des garanties pour l’avenir. Les rassemblemens de troupes formés sur notre frontière seront dispersés ; les agens qui nous ont attaqués seront rappelés et punis ; Abd-el-Kader sera relégué loin de nos limites et de notre influence. On lui assignera une résidence fixe dans l’intérieur, sur les côtes de l’Océan. M. Guizot déclare que toutes ces conditions doivent être stipulées dans des actes formels, et que toutes les mesures sont prises pour arriver à ce résultat.

Le but de cette politique est sage : notre seul intérêt dans la question est