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été porté à la présidence par le hommes du sud, et comment il est encore aujourd’hui le candidat préféré d’un grand nombre d’entre eux.

Du reste, il est à remarquer qu’il se forme depuis quelques années, entre les deux grands partis qui divisent les États-Unis, un parti nouveau dont les progrès sont, pour les hommes du sud une cause d’irritation extrême, et en haine duquel ils briseront peut-être l’Union. Ce parti nouveau, qui voudrait se dissimuler encore, s’intitule le tiers-parti, et serait mieux nommé le parti des abolitionnistes. Les hommes de cette opinion se prétendent neutres sur la plupart des questions qui divisent l’Union, et, en réalité, ils les subordonnent toutes à l’abolition de l’esclavage. Ils votent toujours dans le même sens que le parti whig ; mais ils affectent de s’en séparer, afin de lui laisser toute sa liberté d’action, et de ne pas l’envelopper dans leur impopularité ni dans la haine qu’ils inspirent aux hommes du sud. M. Adams, en prenant la direction du tiers-parti, a abdiqué au profit de M. Clay toutes les chances qu’il pouvait avoir d’être élevé de nouveau à la présidence, car son élection serait un signal de guerre civile. En effet, la question de l’esclavage est, après tout, la grande question qui divise les États-Unis c’est elle qui met surtout la constitution en péril, car les hommes du sud ont mille fois déclaré qu’ils aimeraient mieux rompre l’Union que de voir le gouvernement central non pas abolir l’esclavage, mais seulement le réglementer. Ils ont fait stipuler dans la constitution que le gouvernement ne se mêlerait jamais de ce qu’ils appellent les institutions particulières du sud, et l’on ferait un volume rien qu’en retraçant leurs exigences et leurs susceptibilités à cet égard. Avec l’appui des démocrates, ils ont été jusqu’à faire décider par le congrès qu’il n’avait point le droit d’abolir ni de modifier l’esclavage dans le district fédéral. Les gens du nord, qui connaissent la violence emportée de leurs compatriotes du sud, et qui aiment sincèrement l’union, leur ont fait toutes sortes de concessions : ils ont poussé la condescendance jusqu’à voter plusieurs fois un article suspensif du règlement du congrès, portant que l’on déposerait sur le bureau, sans les lire et sans en rendre compte, les pétitions pour l’abolition de l’esclavage. C’est alors que le tiers-parti trahit son existence : M. J. Q. Adams protesta contre cette violation du droit de pétition ; au commencement de chaque session, il combattit avec énergie la suspension du règlement, et même, il y a quelques années, le vénérable vieillard, refusant de reconnaître une décision contraire à la constitution, rendit compte, malgré la suspension, d’une pétition contre l’esclavage. Aussitôt le parti démocratique entra en fureur, et, en dépit des