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annonçait par une proclamation qu’il était appuyé par la plus haute autorité des États-Unis. Le général Jackson n’eût sans doute jamais osé donner aux troupes américaines l’ordre d’attaquer l’armée mexicaine ; mais il était bien aise de le faire craindre, certain que l’effet moral produit par la marche de Gaines suffirait pour sauver le Texas. En effet, les Mexicains, qui connaissaient le peu de délicatesse politique de leurs puissans voisins, s’alarmèrent de l’approche des troupes américaines, et s’arrêtèrent fort indécis ; puis, les troubles ayant recommencé au Mexique, l’armée ne tarda pas à se disperser et à laisser le champ libre aux Texiens.

Le général Jackson venait de rendre un immense service aux insurgés : il ne s’en tint pas là. Quoique ses fonctions dussent expirer dans cinq ou six semaines, il trouva encore moyen d’employer ce temps utilement pour l’œuvre commune. Après avoir arraché le Texas au Mexique, il fallait préparer l’annexation de son territoire aux États-Unis en faisant reconnaître l’indépendance des Texiens. Le président eut encore recours à la ruse. Il commença par adresser au congrès un message où il déclarait que la délicatesse ne permettait pas aux États-Unis de reconnaître le Texas comme un état indépendant, sans faire une injustice au Mexique. Cependant, quelques jours après, il ajouter au budget des affaires étrangères, par un amendement, une légère somme dans le cas où il deviendrait nécessaire d’avoir un envoyé auprès du gouvernement texien. Quand cette somme eut été votée, il paraît que ce cas si éloigné en apparence se présenta immédiatement, car le président crut devoir nommer un envoyé au Texas trois jours avant l’expiration de sa magistrature. C’est le dernier acte officiel qu’il ait signé : il léguait à son successeur et à son ami, M. Van Buren, le soin d’annexer le Texas, aux États-Unis. C’est ainsi que Jackson atteignit presque le but qu’il s’était proposé en arrivant au pouvoir, et que se trouva à peu près réalisée la prédiction que lui faisait, six mois auparavant, M. Butler, que son administration ne se terminerait pas sans qu’il vît le Texas au pouvoir des États-Unis.

Les faits que nous venons de rappeler prouvent assez clairement que la séparation du Texas d’avec le Mexique a été l’œuvre des Américains du sud, et qu’elle a été singulièrement aidée par la connivence, pour ne pas dire la complicité, du gouvernement des États-Unis. Un passage remarquable de la circulaire adressée en septembre 1842 par le vénérable J. Quincy Adams à ses commettans montre quelle est l’opinion d’un grand nombre d’Américains à ce sujet. « La politique de l’administration de Jackson envers le Mexique, dit M. Adams, est digne