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Il ne faudrait pas juger de ses effets naturels par ceux qu’elle obtient à Birmingham. Partout où le travail se distribue entre mille canaux divers, les conséquences fâcheuses d’une concurrence poussée à l’excès peuvent, dans certains cas, s’atténuer. L’ouvrier chassé d’une occupation émigre vers une autre, et, comme les membres d’une même famille s’appliquent généralement à des métiers différens, les crises commerciales, en les frappant, ne leur enlèvent pas toutes leurs ressources. Quand la misère entre d’un côté, l’aisance vient de l’autre, ce qui fait qu’ils se réfugient rarement, avant la vieillesse, dans les maisons de charité.

A Birmingham, les salaires se tiennent dans une espèce de région moyenne. Quelques ouvriers d’une habileté supérieure gagnent, les hommes trente à quarante shillings par semaine, et les femmes dix à quinze shillings ; la commune n’excède guère 1 livre sterling (25 fr.) pour les hommes et pour les femmes 7 sh. (8 francs 75 cent.). Les enfans, à l’exception des petits malheureux employés dans les fabriques d’épingles, ne travaillent pas avant l’âge de dix ans ; mais aussi, dès cet âge, aucune loi n’interdit de les assimiler aux adultes pour la durée du travail. L’atelier ne consumant pas la première fleur de l’enfance, les écoles publiques reçoivent un plus grand nombre de pupilles que celles de Manchester. Les progrès de l’instruction à Birmingham semblent avoir tenu ceux du crime en échec. En 1841, le nombre des arrestations fut de 5556 ou de une sur 32 habitans ; c’est moitié moins qu’à Liverpool.

Mais, encore une fois, si l’on veut voir la démocratie industrielle telle qu’elle est en Angleterre et telle qu’elle peut être, ce n’est pas à Birmingham que l’on doit aller. Il faut l’examiner de préférence dans ces petites villes où le travail se trouve réduit, comme dans les centres aristocratiques, à deux ou trois branches d’occupation, et où le luxe et la civilisation d’une métropole ne concourent pas à en dénaturer les résultats. Il faut l’observer à Wolverhampton et à Willehall. Birmingham, Wolverhampton et Willenhall sont comme les trois degrés de la démocratie industrielle en Angleterre, démocratie qui s’abaisse à mesure que son horizon se restreint. A Birmingham, on l’a vu, elle a des apparences florissantes et se trouve à l’aise au milieu de tant de productions diverses, allant de la quincaillerie aux bronzes, des bronzes aux fabriques d’armes, de celles-ci à la bimbeloterie et aux cristaux. A Wolverhampton, elle descend d’un cran, cette ville n’étant plus en quelque sorte qu’une frraction de Birmingham et appliquant au travail du fer sous toutes les formes ses quarante mille habitans.