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eut à soutenir les assauts du parti whig. La révolution de juillet et l’établissement de 1830 ont été reconnus par le ministère tory du duc de Wellington et de sir Robert Peel. Quelques années après, lorsque les whigs arrivèrent au pouvoir, lorsque lord Grey, lord Lansdowne, lord Holland, devenus ministres, trouvèrent investis parmi nous des hautes influences leurs anciens amis, on crut que l’on pourrait transporter, dans les rapports des deux pays, les sentimens inspirés par de délicates et nobles sympathies privées, et c’est alors plus que jamais que s’établit en France l’opinion qui représentait les whigs comme nos amis naturels et nécessaires.

Il est vrai qu’il y avait, en ce moment, plus qu’un rapprochement de sentimens personnels : il y avait des deux côtés similitude de situation, et de cette ressemblance sortait comme une identité d’intérêts. Le parti whig tentait, par le bill de réforme, de déplacer en Angleterre la base du pouvoir, de l’étendre et de l’appuyer principalement sur les middle classes ; en France, à la tête des classes moyennes, maîtresses de la prépondérance politique, on entreprenait une œuvre analogue. L’élan que la commotion de juillet avait donné au mouvement réformiste, l’intérêt qu’avaient les whigs, pour le succès de leur propre entreprise, à voir réussir notre révolution, tout leur faisait alors un devoir de prêter secours à l’œuvre que la France poursuivait. Les whigs n’ont pas manqué à cette obligation. S’il n’est question en France que de l’établissement d’une monarchie modérée appuyée sur des institutions libres, les sympathies et le concours des whigs nous sont assurés ; mais une fois cette question résolue, une fois les épreuves d’établissement constitutionnel et de forme de gouvernement terminées chez nous, lorsqu’il ne s’agit plus que des affaires positives et régulières et des intérêts extérieurs des deux pays, les whigs ne nous doivent plus de concours dans les affaires que lorsqu’il y a coïncidence dans les intérêts des deux pays, et ils ont pu, sans manquer à leur consistance politique (nous ne jugeons pas ici avec quels procédés ils l’ont fait), se détacher de l’union de la France, quand les intérêts anglais leur ont paru se séparer des intérêts français. Les whigs (et nous devrions dire tous les Anglais) aiment mieux une France constitutionnelle qu’une France despotiquement gouvernée : là se bornent les sympathies politiques permanentes sur lesquelles il est permis à la France de compter en Angleterre ; au-delà, les partis anglais ne peuvent être dirigés au pouvoir que par les intérêts de gouvernement et par les nécessités particulières de leur situation.

Ce n’est donc plus à des inclinations privées, à des admirations théoriques,